mercredi 1 novembre 2017

[Chronique] Vuur - In This Moment We Are Free - Cities

Depuis son départ de The Gathering il y a déjà dix ans, Anneke van Giersbergen s'est clairement investie dans deux carrières très distinctes, la pop/folk acoustique, d'abord sous le nom d'Agua da Annique puis sous son propre nom, qui ne m'intéresse pas du tout et dont je me contrefous, et, plus intéressant pour moi, ses multiples participations prog métalliques, principalement chez Devin Townsend ou chez Arjen Lucassen avec Ayreon et plus récemment The Gentle Storm, permettant à la batave de se bâtir une sacré discographie, malgré tout difficile à suivre et disparate (et surement difficile à monétiser en live...), c'est ainsi qu'arrive Vuur, le tout nouveau groupe d'Anneke qui a pour but de rassembler toutes les aspirations Heavy et purement Heavy de la hollandaise, et qui nous livre ici un pur produit musical formaté que toute l'émotion et la sensibilité du chant d'Anneke auront du mal à sublimer...

WTF c'est quoi cette barbe!?
Pour son premier tour de piste, Anneke van Giersbergen a assemblé une grosse team de mercenaires qui connaissent leur affaire, l'ancien bassiste de Stream of Passion Johan van Stratum, les guitaristes Ferry Duijsens (The Gentle Storm, Agua de Annique) et Jord Otto (ReVamp), et le légendaire batteur Ed Warby, tout cela est chapeauté par le producteur Joost van den Broek, également crédité dans le songwritting du truc, en compagnie de Mark Holcomb (Periphery), Esa Holopainen (Amorphis), ou encore Daniel Cardoso (Anathema), sérieusement, ça fait une telle gigantesque liste de personnes qui ont collaboré à l'écriture de ce premier album que ça en devient presque ridicule.

In This Moment We Are Free - Cities propose onze morceaux, chacun dédié à une ville, ce qui pourrait faire penser à un concept album, sauf que ce n'est pas le cas, c'est juste un petit enrobage pour qu'Anneke puisse marketer le bouzin facilement en interview en balançant quelques anecdotes sur ces villes qu'elle a visitées, et de toute façon, à de très rares exceptions près, les villes visitées n'auront que très peu d'influence sur la coloration des morceaux, bien évidemment, alerte cliché, il y aura une petite touche orientale vite torchée sur Istanbul, ce sera toujours le même Modern Metal progressif que sur les autres morceaux, mais avec un arrière goût de Kebab.
Musicalement, c'est assez facile à décrire, vous prenez le premier titre My Champion - Berlin, et vous avez globalement écouté tout l'album, car oui, les riffs génériques un peu Djent à la Voyager seront présents sur l'intégralité de la galette, pire encore, ce sera la même production, tout le temps, ce son clinique, froid, synthétique, Vuur fait dans le Metal en plastique, qui ne dégage aucune émotion, qui brode un prog moderne et sans âme, heureusement, et c'est bien la seule chose que l'on retiendra, c'est la prestation d'Anneke, en tout point remarquable de justesse et d'émotion dans cet univers aseptisé, la batave tient le morceau à bout de bras, c'est d'ailleurs presque le seul intérêt de l'album, retrouver le chant d'Anneke dans un contexte totalement Metal.

Berlin est dans le haut du panier des titres de Cities, parce que malgré tout, il faut avouer que le morceau joue sur des dynamismes sonores intéressants et se montre plutôt varié, pour un morceau qui dure plus de sept minutes, on ne voit pas du tout le temps passé, encore une fois, on s'emmerderait surement comme un rat mort s'il n'y avait pas Anneke derrière le micro pour sublimer tout ça, London est également une réussite, Anneke à beaucoup traîné avec Devin Townsend ces dernières années et ça se sent sur un morceau qui pourrait avoir été écrit par le canadien, le refrain de Santiago semble tout droit sorti d'un vieux The Gathering, et les motifs orchestraux sont d'ailleurs assez proche de ce qu'Anneke faisait avec son ancien groupe il y a vingt ans, ce qui est un clin d’œil plutôt sympathique, Istanbul sera une sorte de mix entre Orphaned Land et Voyager, les passages orientaux sont clichés à mort mais le groupe à le bon goût de ne pas en faire des tonnes.

Quand la musique se fait dynamique et colle à l'intensité émotionnelle d'Anneke, Vuur est une réussite, mais quand ce n'est pas le cas, cela donne des morceaux pénibles comme Rotterdam où tout le monde galère même Anneke, le titre est massif, martial, trop chiant et longuet pour pouvoir être sauver par sa chanteuse, Vuur aura également des titres de remplissages sans saveur comme San Francisco, Mexico ou Beirut, ce ne sont pas forcément de mauvais titres, mais pour un groupe qui se veut progressif, les structures s'avèrent être plutôt simplistes et répétitives, on est pas aidé par une production qui retire toute aspérité au son et qui rend les riffs carrément quelconques, le fait que Vuur ait tendance à proposer des morceaux toujours une ou deux minutes trop longs n'aide pas non plus à les rendre accrocheurs

Cities repose presque intégralement sur le talent de sa chanteuse, sur l'émotion qu'elle dégage et sa sensibilité, sans le chant d'Anneke et sa personnalité, il ne resterait de Vuur qu'un Metal progressif moderne sans aucune âme, irrémédiablement quelconque et sans intérêt, ce n'est qu'Anneke qui permet de relever le niveau de la tambouille, mais elle n'y arrive pas tout le temps, il faut également signaler que malgré tout l'annuaire du Metal hollandais qui semble avoir participé au songwritting de l'album, les compositions de Cities sont particulièrement safe et sans aucunes surprises, le groupe ne prend aucun risque, la production clinique et passe-partout ne joue pas non plus en la faveur d'un album qui sonne comme n'importe quel groupe de Metal en plastique, on aurait aimé plus d'aspérités, plus de rondeurs ou de Groove pour accompagner une Anneke au top qui fait tout ce qu'elle peut pour sublimer une tambouille modern prog un peu fadasse très largement inspiré par Townsend.

Cities est un album assez bizarre, ambivalent, constamment partagé entre un ensemble instrumental très froid, ne générant aucune émotion et évoluant dans un Prog moderne et aseptisé, et une vocaliste qui joue au maximum sur son registre émotionnel et qui délivre de véritables moments de grâce quelque peu en décalage avec le reste.
On est passé à côté de quelque chose qui aurait pu être très bien, l'ensemble est Heavy, bien branlé, riche en détail, mais trop aseptisé, répétitif, souvent trop long, il ne restera finalement de ce disque qu'une nouvelle démonstration du talent d'Anneke van Giersbergen, dommage qu'elle évolue sur une musique aussi formatée et sans âme.
Track Listing:
1. My Champion - Berlin  07:36
2. Time - Rotterdam  06:40
3. The Martyr And The Saint - Beirut  05:34
4. The Fire - San Francisco  04:46
5. Freedom - Rio  06:06
6. Days Go By - London  06:30
7. Sail Away - Santiago  06:00
8. Valley Of Diamonds - Mexico City  06:24
9. Your Glorious Light Will Shine - Helsinki  05:32
10. Save Me - Istanbul  05:04
11. Reunite! - Paris  04:38