jeudi 30 juin 2016

[Chronique] Sheidim - Shrines of the Void

Tiens, ça fait longtemps qu'on a pas parlé de Black Metal ici, je parle de vrai Black hein, pas de trucs expérimentaux avant-gardiste avec du Black dedans, du pur et dur qui sent la vieille crypte humide, pour ça, il est évident que l'on ne va pas du tout parler du dernier Dark Funeral parce que je m'en fous complètement et qu'il a rejoint la corbeille après une seule écoute, et on va plutôt se diriger vers un groupe inconnu qui sort son premier disque, des espagnols en plus, parce que c'est bien connu, entre deux siestes et une fournée de tapas, c'est en Espagne qu'on fait le meilleur Black suédois (affirmation à prendre avec des pincettes quand même).

Les méchants dévoreurs de chorizo à la chair humaine qui font peur
Ça tombe bien que je vous ai cité Dark Funeral plus haut, parce que bon, difficile de ne pas le faire quand on parle de Black à la suédoise, et il est plutôt évident que Sheidim (une connerie de démon chez les hébreux) va vous rappeler un peu Dark Fu, comme on l'appelle chez les jeunes, mais pas que, car est-ce que vous vous souvenez de Watain? pas le Watain récent plutôt nul hein, le Watain du temps où c'était bien (coucou Casus Luciferi), oui? non? on s'en fout en fait, car les jeunes hidalgos furibards de Sheidim s'en souviennent très bien eux, et vont vous le faire savoir avec Shrines of the Void, un Black à la suédoise, très orthodoxe, classique, mais également, ce qui réhausse la qualité de la tambouille, joué avec une redoutable conviction et un savoir-faire indéniable.

Ah, j'oubliais, on trouve aussi des traces d'ADN de dissection dans le bouzin, mais bon, vu le genre pratiqué, c'est bien le contraire qui eût été étonnant.
Bref, partant de là, l'originalité, vous pouvez vous la carrer profondément dans le fondement, mais ce n'est pas ce qu'on recherche dans ce genre d'album, ce qu'on veut, c'est de la mélodie tranchante et démoniaque, de la tornade de riffs, de l'atmosphère poisseuse et du chant dégueulasse, servi sur un coulis de Blasts, et c'est précisément ce que va nous proposer Sheidim avec son premier album, de la torgnole in your face qui dépote, et qui flirte souvent avec un peu de Death histoire de varier les plaisirs et de ne pas tomber dans la routine, en plus ils ont eu le bon coup de faire dans le concis, puisqu'on atteint même pas les quarante minutes, on ne va pas se mentir, c'est largement suffisant.

Enfin bon, quand je dis varié, faut pas trop pousser non plus, c'est souvent joué pied au plancher sans aucune pitié, d'ailleurs le premier titre First Poison va se se charger de mettre les choses au point, une gouleyante petite introduction ambiancée qui sert de rampe de lancement à un Black diablement ravageur qui ne lésine pas sur les leads et une rythmique bien costaude comme il faut, y'a pas à chier, ça rendre dans le lard, mais ça n'oublie pas non plus les atmosphères, et en parlant d'atmosphères, le second titre Shrines of the Void ira un peu plus loin dans le déluge blasphématoire, un morceau qui est surement le meilleur titre de Watain depuis dix ans; Deviant Kingdom aura également ce petit côté démoniaque, grâce à des leads parfaitement ciselées et concises, qui ne prennent jamais plus de place que nécessaire.

Sunken Nigredo sera surement la meilleure pièce de l'album, celle qui parviendra à mélanger habillement un Black mélodique rigoureux avec quelques penchants Death sulfureux qui confère au titre une saveur toute particulière, et niveau leads, ça envoie du très très lourd, contribuant à une ambiance générale menaçante et glaciale, Amrita sera quelque peu différent dans son approche, on retrouvera toujours ce Black orthodoxe et mélodiquement brutal, mais cette fois-ci avec une vibe plus ritualiste, que ce soit dans les mélodies ou ce curieux passage central tribal, on se croirait presque chez un Rotting Christ en grande forme par moment, qui aurait passé beaucoup de temps en Suède.

Sheidim à également une autre corde à son arc pour séduire, une production plutôt dantesque pour le genre, où j'ai failli tomber de ma chaise quand j'ai vu s'afficher le DR12 sur mon petit logiciel de mesure, comme quoi, pas besoin de compresser à mort pour obtenir un son ravageur et oppressant, le son est clair, limpide, très dynamique, et on entend même parfois de la basse, bon, ok, faut faire très attention, mais on l'entend, ce qui est relativement rare dans le genre, du coup, désolé les trve élitistes, mais on a pas un son de cave dégueulasse, ce qui n'empêche pas Sheidim d'être trve à sa manière, avec un putain de bon son, c'est d'ailleurs Dan Lowndes de Cruciamentum qui s'est occupé du mastering, un gage de qualité.

Bon, c'est pas la révolution du Black de l'autre côté des Pyrénées, mais avec Shrines of the Void, Sheidim nous propose un premier album diablement convaincant, malgré le caractère très orthodoxe de leur Black, les espagnols parviennent à y insuffler un peu de fraîcheur, picorant du côté de Watain ou de dissection, sans oublier une légère touche de Death qui fait son petit effet.
Il est clair que si vous n'aimez pas le genre, Shrines of the Void ne vous fera pas changer d'avis, c'est un fait, mais pour tous les déçus de Watain, et il y en a beaucoup, Sheidim s'impose comme une alternative plus que crédible pour les amateurs de Black blasphématoire bourrin et mélodique.