lundi 2 avril 2018

[Chronique] Primordial - Exile Amongst the Ruins

On avait quitté Primordial il y a quatre ans sur un Where Greater Men Have Fallen plutôt très bon et malin dans son processus de consolidation de sa légende, le genre d'album pas exceptionnel mais largement au dessus de la mêlée, de quoi maintenir le statut du groupe et satisfaire n'importe quel fan du gang irlandais, un disque plutôt classique dans son approche, certes, mais qui amenait malgré tout quelques évolution dans le son de Primordial, principalement une dose de Heavy Metal en plus grande proportion qui laissait indiquer que le qualificatif Black Metal ne pouvait plus réellement s'appliquer à un Primordial attaquant à l'époque sa troisième décennie d'existence, que le Primordial d'aujourd'hui soit différent du Primordial d'il y a dix ou surtout vingt ans est quelque chose de normal et un processus naturel d'évolution qu'on ne peut pas leur reprocher, surtout quand la qualité a toujours été au rendez-vous... jusqu'à aujourd'hui, parce que pour la première fois, on ressort irrémédiablement déçu de l'écoute d'Exile Amongst the Ruins.

Ce n'est pas la première fois qu'on est déçu par Primordial, mais à l'époque c'était parce qu'on était tellement habitué à de l’exceptionnel que le "très bon" était forcément un tout petit peu décevant, là, on est dans un cas totalement différent, puisque Exile Amongst the Ruins est à la discographie de Primordial ce que les œufs de lompe sont au caviar, et quand on est habitué au caviar j'ai du mal à imaginer comment on peut être satisfait par un ersatz, certes de bonne qualité pour ce qui n'est qu'un succédané, mais tellement loin de ce qu'il est censé imiter...

Bien sûr, Exile Amongst the Ruins n'est pas un gigantesque échec non plus, je connais pas mal de groupes qui se contenteraient de ce genre d'échec, mais dans le cadre de Primordial, on tombe de très haut avec un disque incroyablement ennuyeux et plombé par des morceaux manquant de dynamisme et de direction, Exile Amongst the Ruins est presque un album de Heavy Rock mixé avec un peu de Doom et des influences Black, pour en faire l'album le plus mou de toute l'histoire du groupe, on a connu Primordial capable de composer de longues pièces épiques qui fonctionnaient sur des dynamismes sonores, des oppositions de style entre un Black rustique et des inclinaisons Doom mélancolique, où les atmosphères ne passeront que par le chant bien trop théâtral d'un Alan Averill qui a l'air de se faire chier sur des compositions qui ne dégagent plus grand chose émotionnellement parlant, Nail Their Tongues doit bien être l'opener le plus faible de toute la discographie de Primordial, le morceau s'ouvre sur un riff Heavy Doom classique et répétitif et l'on se croirait presque chez un Bathory pas au meilleur de sa forme, ça pionce à mort et l'on sera heureusement réveillé par une brusque accélération Blackisée au growl fatigué qui apparaît complètement hors de propos dans le cadre de ce morceau, ils referont le coup une seconde fois histoire de clôturer ces neufs minutes assommantes et plutôt vaines.
To Hell or the Hangman sera lui un peu différent, mais tout aussi médiocre, imaginez un Iron Maiden tout mou qui sombrerait dans un post-Rock à la Solstafir, pour sept minutes de... rien, on a affaire à un morceau linéaire à mort qui ne va nulle part et qui ne construit rien, c'est comme si To Hell or the Hangman était un build-up de sept minutes qui ne débouchait sur absolument rien, le morceau s'arrête presque brutalement en plus, il y a une petite ambiance qui parvient à se créer progressivement, même une certaine tension, et ça ne débouche sur rien, il faudra attendre le troisième morceau pour que l'on retrouve un bon morceau de Primordial, Where Lie the Gods introduira de l'acoustique dans un titre sombre, puissant et mélodique qui va vraiment dégager de l'émotion, avec un Averill au meilleur de sa forme, il faudra profiter de cette hausse soudaine de qualité car l'album va vite retomber dans sa léthargie avec un titre éponyme tout bonnement moyen, et qui n'est finalement que du mauvais remplissage mollasson et d'une redoutable fainéantise, on se demande où Primordial veut en venir quand il balance des titres aussi quelconques que Upon Our Spiritual Deathbed ou Sunken Lungs, le genre de morceaux que le groupe doit probablement être capable de chier à la chaîne quand il n'a pas envie de s'emmerder, on notera quand même une bizarrerie avec Stolen Years, qui ressemble à un mélange entre du U2 et du Solstafir, dommage qu'encore une fois, le groupe ne va pas au bout de sa démarche et se contente de rester à la surface de manière bien trop superficielle.
C'est le gros problème de cet album, Primordial délaisse le Black et le Folk pour le Heavy et post-Rock, bien, pas de problème, mais ils n'ont jamais les couilles d'aller au bout du truc, et donc, forcément, l'album ne peut pas être satisfaisant, un peu comme si Primordial connaissait la destination mais n'avait aucune putain d'idée de comment y arriver, cela donne des morceaux qui n'ont aucune direction, des build-up qui n'ont pas de climax, Primordial a des tonnes d'idées qui sont ici à l'état embryonnaire, ils n'ont pas pris le temps de les développer, et on se retrouve avec un album où les morceaux errent sans but précis, il faut également noter que la production semble tout faire pour retirer au son Primordial toutes ses aspérités, c'est clean, sans âme, la batterie est largement en retrait, on a affaire à une production tout ce qu'il y a d'impersonnel qui contribue à plomber l'album encore davantage.

Grosse déception que cet Exile Amongst the Ruins, je ne m'attendais pas, après les premiers singles, à l'album le plus Heavy de l'histoire du groupe, mais je ne m'attendais surement pas à tomber sur le plus mauvais, c'est triste mais c'est ce qu'est Exile Amongst the Ruins, un mauvais disque de Primordial, qui tente de compenser son manque de direction et d'inspiration par des clichés et ses lieux communs, on s'emmerde à l'écoute de cet album, j'avais envie d'écouter du Primordial, pas de chance, Exile Amongst the Ruins est une version Heavy de Solstafir avec Averill au micro, j'espère que ce gros coup de moins bien ne sera que temporaire et que le groupe retrouvera la formule, en attendant je vais tout simplement oublier que cet album existe.