mercredi 25 avril 2018

[Chronique] Barren Earth - A Complex of Cages

Formé il y a déjà une bonne dizaine d'années, Barren Earth s'est l'air de rien forgé une discographie plus qu'honnête, ce qui n'était pas forcément attendu de la part de ce qui est encore aujourd'hui un supergroupe, ce genre de projet ayant généralement tendance à être des one-shot à durée de vie très limitée, les finlandais semblent se complaire à se réunir tous les deux-trois ans pour sortir un album de très haute qualité dans un genre bien défini qui n'évolue pas vraiment, mais ce n'est pas vraiment ce qu'on recherche dans un album de Barren Earth, vous aimez le Prog? le Death méoldique avec du Doom? et bien voilà, c'est exactement ce que vous aurez une fois de plus avec A Complex of Cage, la recette habituelle concoctée par des types malins qui savent très bien doser leur musique pour éviter le sentiment de répétition, c'est toujours la même chose, mais un poil différent...

Faire du Barren Earth c'est pas trop compliqué quand même, vous prenez du Death mélodique chargé de Doom typiquement à la finlandaise, vous rajoutez un peu de claviers old-school à la Amorphis de la vieille époque, une bonne grosse louche d'arrangements psychédélique directement puisés dans les 70's, du Death Prog qui sent bon les années 90, et aussi quelques saveurs orientales, car c'est le moment de name-dropper en masse les références présentes sur cet album: Amorphis, Opeth, Edge of Sanity, Orphaned Land, et comme vous avez un line-up qui déborde de talent avec des gars aux CV longs comme le bras, il n'y a aucune chance que les mecs puissent se louper, Barren Earth évolue tranquillement et avec classe dans le cadre défini qu'il s'est imposé, aucune surprise à attendre, bonne ou mauvaise, la qualité sera une fois encore au rendez-vous.

Après tout, c'est le quatrième album des finlandais, Barren Earth reste dans le domaine de ce qu'il sait faire, musicalement mature, avec un chanteur qui commence à trouver sa place dans le groupe, le féroïen Jón Aldará (des excellents Hamferð), arrivé un peu sur la pointe des pieds il y a trois ans, va ici pouvoir déployer tout son talent, notamment un chant clair qui s'est très nettement amélioré depuis On Lonely Towers, il ne sera surement pas étranger à quelques inflexions dans la musique de Barren Earth, car quelques rapprochements pourraient désormais être fait avec le prog des norvégiens de Leprous, et ça arrive très vite dans l'album, dès le titre d'ouverture The Living Fortress, le Death Prog attendu sera d'ailleurs quelques peu aux abonnés absents, bien sûr ça growl un peu hein, mais Barren Earth va privilégier le progressif et les sonorités psychédéliques et une délicieuse propension à l'acoustique, ce qui n'empêche pas que même si ça manque de Death, ça déborde de classe sans tomber dans le mielleux et la branlette prog.

Dès le titre suivant, Barren Earth proposera quelque chose d'un peu plus couillu, The Ruby débordera de riffs et de leads Death/Doom mélodique à la finlandaise qui font plaisir, et le chant clair d'Aldará touchera sa cible avec un refrain foutrement accrocheur, classique, massif, avec juste ce qu'il faut de prog et d'orchestrations, difficile de faire plus classe que Barren Earth, et qui ne succomberait pas aux intonations viriles du Death Prog à la Swanö, également présente sur un Further Down sombre et rugueux qui se lance sans crainte dans de subtiles arabesques progressives, et quand je vous parlais d'Orphaned Land comme influence, on va vite y arriver avec le dernier tiers de Zeal, en dehors du growl bien plus massif que chez les israéliens, on s'y croirait, le début de Scatterprey sera encore plus proche, c'est exactement du Orphaned Land pendant les 45 premières secondes avec ses arrangements acoustiques et sa coloration orientale, ces références reviendront d'ailleurs à plusieurs reprises dans le morceau, un morceau qui ne fait pas que ça, car il s'articulera également autour d'un Death Prog plutôt vindicatif à la Edge of Sanity.

Le problème qu'on peut avoir avec cet album, c'est que l'ami Aldará  a certes un excellent chant clair, de même qu'un excellent growl, mais son chant va vite s'avérer particulièrement répétitif et unidimensionnel, les refrains ont souvent tendance à tous se ressembler à la longue, ce qui va nuire un peu à l'album, un morceau comme Spire par exemple, pourtant bien ancré dans le Death, va se retrouver plomber par un chant clair larmoyant qui n'a finalement pas grand chose à faire là, et encore une fois, je crois bien que c'est un choix conscient de la part de Barren Earth, de se rapprocher par moment de Leprous, et dans ce sens, le choix Aldará s'avère judicieux, mais il faudra que le gaillard progresse encore pour absorber pleinement cette influence, son chant clair manquant vraiment de relief par moment, Withdrawal est surement le morceau le plus proche de Leprous de la galette, avec un chant qui passe à côté et qui ne parvient pas à insuffler au titre une vraie dramaturgie.

Malgré tout, il ne faut pas faire la fine bouche, A Complex of Cages reste un excellent disque de Barren Earth, et également un putain de bon disque de Death progressif, Barren Earth évolue dans ce qu'il sait faire et rien d'autre, mais le groupe n'a jamais eu vocation à révolutionner le genre, A Complex of Cages, en dehors d'un chanteur par moment pas encore au point, reste un album particulièrement bien équilibré, qui revient à un Death plutôt charpenté et couillu tout en conservant ses subtiles ramifications progressives, Barren Earth est revenu à une certaine efficacité avec ce disque, ce qui est plutôt une bonne chose, le groupe connait sa formule et s'y tient, si le vieux Opeth vous manque, voir Edge of Sanity, voir aussi le vieux Amorphis, Barren Earth jouera avec brio son rôle de substitut de choix, ce qui est déjà pas mal...
Track Listing:
1. The Living Fortress  06:45
2. The Ruby  04:48
3. Further Down  06:33
4. Zeal  07:45
5. Scatterprey  05:40
6. Solitude Pith  10:17
7. Dysphoria  07:45
8. Spire  06:37
9. Withdrawal  05:16