mercredi 21 mars 2018

[Chronique] Oceans of Slumber - The Banished Heart

Il y a deux j'avais été plutôt dur avec Winter, un second album d'Oceans of Slumber qui était marqué par un changement de style drastique après un premier album quelque peu rustique, l'arrivée d'une chanteuse, et l'ouverture à des influences bien plus diverses, malheureusement tout ça n'avait pas trop tenu la route et en dehors de deux-trois morceaux où le groupe parvenait à faire tenir ensemble tout un tas de genres différents dans des structures cohérentes, Winter était plombé par un manque de cohésion certain, un agencement des morceaux foireux, et une propension à l'ennui, à de trop rares moments Oceans of Slumber parvenait à faire converger son Doom/Death progressif et ses aspirations Rock atmosphérique, et quand c'était le cas, putain que c'était bon, et globalement, c'est tout ce que j'espérais de The Banished Heart que Oceans of Slumber trouve enfin la formule magique et parvienne à équilibrer leur tambouille sur l'intégralité d'un album.

Alternant pendant Winter entre le brillant et le médiocre, Oceans of Slumber était un groupe à fort potentiel qui ne parvenait pas à équilibrer sa recette et qui voulait surement trop en faire, et bien avec The Banished Heart, on a enfin un groupe qui s'est décidé à se concentrer sur le songwritting et qui a fait le ménage dans sa musique, The Banished Heart sera plus simple et efficace que son prédécesseur, sans pour autant affecter la dimension progressive du groupe et son écriture versatile, The Banished Heart sera le disque de l'équilibre, où Oceans of Slumber s'avère enfin capable de jouer sur la dimension atmosphérique et mélancolique de sa musique tout en restant redoutablement heavy, en fait, et plus simplement, Oceans of slumber a conservé tout ce qui fonctionnait sur Winter et a dégagé le reste, terminé le songwritting à qualité aléatoire et les éléments disparates qui se baladaient là-dedans sans aucune raison, les maîtres-mots de The Banished Heart seront simplicité, raffinement, émotion et caractère.
Le morceau d'ouverture The Decay of Disregard sera assez révélateur de ce que le groupe veut accomplir sur cet album, on a affaire à une pièce de Doom atmosphérique qui prend aux tripes, dominée par une Cammie Gilbert toujours aussi charismatique, dont le chant est toujours aussi poignant et sensuel, le morceau dégage une ambiance particulièrement morose mais paradoxalement, Oceans of Slumber parvient à se montrer énergique, seulement c'est beaucoup plus subtile qu'avant, le morceau s'articule autour d'une structure simple où viennent s'agréger tout un tas de détails sonores qui lui offre richesse et profondeur, on trouvera également les signatures sonores typique du groupe, comme cette petite session de blast-beats qui musclera la fin du morceau en lui conférant une légère touche épique, Fleeting Vigilance prendra la suite de manière plus nerveuse et musculeuse, le growl de Sean Gary contrebalancé par le chant féminin sur un morceau pas des plus rapides mais heavy et efficient, un build-up qui conduira à un excellent solo comme point culminant.
Ce début d'album ressemble beaucoup à celui de Winter, sauf que là, après deux morceaux très bons, Oceans of Slumber ne va pas foutre son disque en l'air avec une reprise bancale qui n'avait rien à faire là et des morceaux de pop-atmo sirupeux complètements nuls et remplis de clichés, At Dawn démarrera tranquillement, délicatement, avant une bonne grosse injection d'éléments Black Metal dans un Doom/Death progressif superbement lourd et massif (Howl Of The Rougarou comprendra également quelques sonorités Black/Death), où les vocalises de Gilbert parviendront à se frayer un passage dans l'obscurité, et comme s'il fallait contrebalancer immédiatement, le titre éponyme The Banished Heart sera un vrai bijou de Metal gothique atmosphérique finement orchestré et qui va prendre le temps de poser ses atmosphères, on pourra objecter que c'est peut-être un poil trop long, surtout qu'il sera suivit d'une interlude un peu inutile qui sert d'ouverture à un Etiolation qui évoluera comme un vrai morceau de Death mélodique, un morceau qui fonctionne un peu comme un duo avec A Path To Broken Stars, ce dernier ajoutant un riffing un peu plus intriqué et dense et des arrangements électroniques.

Contrairement à il y a deux ans, Oceans of Slumber n'a pas plombé son disque avec une longue plage atmosphérique indigeste en plein milieu de l'album, cette plage atmosphérique sera ici placée en fin de disque, et elle ne sera pas indigeste du tout, il faut dire que sur No Color, No Light, Oceans of Slumber s'est offert les services du roi du Progressif déprimant en la personne de Tom Englund, l'album se conclura d'ailleurs de fort belle et délicate manière sur un Wayfaring Stranger qui est une variation d'un classique du Folk/Gospel américain.
Bien sûr, tout n'est pas parfait non plus chez Oceans of Slumber, mais s'ils ont fait le ménage, leur musique est parfois encore un peu trop bourgeonnante et trop dense, ce qui est dommage car on a parfois l'impression que c'est à la seule Cammie Gilbert que revient la tâche de faire passer toute l'émotion de la musique et que le groupe se repose trop sur elle, The Banished Heart est peut-être trop long aussi, certains titres auraient largement pu être soulagés d'une minute ou deux, le mix est également un peu bizarre, les guitares sont parfois trop en avant et on perd Gilbert en cours de route de temps en temps, et puis il y a le cas Dobber Beverly, excellentissime batteur, qui forme vraiment la base du son Oceans of Slumber, mais qui en fait parfois un peu trop, c'était déjà le cas sur Winter, il a tendance à mettre des blast-beats dès qu'il peu et à surjouer, ce qui peut être gênant quand le groupe essaie de développer une atmosphère gothique et mélancolique et que le gars déboule avec un gros blast.

Quoi qu'il en soit, il y a eu un gros progrès en même pas deux ans de la part du groupe, le songwritting de The Banished Heart est moins dérivatif qu'il ne pouvait l'être avec Winter, c'est plus cohérent aussi, et même si Oceans of Slumber conserve ce caractère versatile, on sent que le groupe a trouvé un certain équilibre dans son Doom/Death atmosphérique aux ramifications progressives.
The Banished Heart est également la confirmation du talent de la chanteuse Cammie Gilbert, qui contrebalance avec sensibilité et charisme une musique qui peut être parfois un peu trop froide malgré les progrès réalisés de ce côté-là, reste un album malgré tout réussi, poignant, énergique, presque épique dans son approche, joué avec sensibilité et subtilité.
Track Listing:
1. The Decay Of Disregard  08:59
2. Fleeting Vigilance  05:25
3. At Dawn  08:30
4. The Banished Heart  09:05
5. The Watcher  02:25
6. Etiolation  06:01
7. A Path To Broken Stars  06:31
8. Howl Of The Rougarou  05:02
9. Her In The Distance  02:03
10. No Color, No Light  07:17
11. Wayfaring Stranger  03:41