samedi 13 janvier 2018

[Chronique] Watain - Trident Wolf Eclipse

Avec The Wild Hunt, sorti il y a déjà cinq ans, Watain nous avait pondu un album controversé et particulièrement clivant, qui finalement était à l'image de la carrière de ce gang suédois de bikers du Black Metal à l'hygiène tout ce qu'il y a de plus douteuse, difficile à suivre, constamment tiraillé entre le trve Black, sa volonté de plaire à un public mainstream, et son appétence pour les expérimentations, ce qui nous avait donné un album bancal à mort de Trve Black Thrash Grand Public Expérimental (ouais, tout ça) foutraque et schizophrénique.
Cinq ans plus tard, que reste-t-il des expérimentations de The Wild Hunt? rien.
Bah ouais, si vous vous attendiez à un pas supplémentaire vers le mainstream ou encore plus d'expérimentations, c'est raté, Trident Wolf Eclipse est un disque tout ce qu'il y a de plus classique pour du Watain, et un certain retour à un Black direct et sans concessions, même si comme d'habitude avec Watain, on aura toujours un doute concernant la sincérité de la démarche.

Bref, Trident Wolf Eclipse représente un véritable retour en arrière pour les suédois, peut-être une réaction, consciente ou non, à toutes les expérimentations controversées qu'a réalisées le groupe depuis deux albums, car en plus de The Wild Hunt, Lawless Darkness était déjà plus ou moins expérimental dans son genre, même si c'était de manière moins drastique, cette recherche de sophistication s'arrête donc net avec Trident Wolf Eclipse, qui pourrait être résumé comme étant l'album de la simplicité, un Black ultra direct et putride, expédié comme un poing dans la gueule avec ses trente-cinq minutes au compteur, ce qui en fait l'album le plus court de toute l'histoire du groupe, un album garanti sans grosses quenelles à chant clair, ici ça va bourrer, huit morceaux chacun d'environ quatre minutes comme autant de coups de pieds au cul.

Bien sûr on parle de Watain, donc ça va pas être du génie, Watain est davantage un groupe d'habiles recycleurs du Black Metal et ça ne va pas vraiment changer avec ce nouvel album, un retour aux affaires Black pur et dur qui coïncide, comme par hasard, avec le fait que le groupe célèbre cette année pile-poil ses vingt ans d'existence, quoi de mieux pour remettre les pendules à l'heure et marquer le coup que de repartir sur du basique, et il faut bien l'avouer, du très facile et diablement prévisible, en utilisant les bonnes grosses ficelles du genre et rassurer les fans qui avaient peut-être quitté le navire ces dernières années, l'album s'ouvrira d'ailleurs sur un Nuclear Alchemy ultra bourrin et ravageur, une tornade de riffs acérés servi par un son un peu crade et grésillant complètement artificiel mais ça passe, Watain ne trompe, cette fois-ci, personne, sur ces intentions avec un bon gros brûlot punitif qui a de forts relents de Necrophobic et de 1349, c'est pas comme si le but de la manœuvre était de réinventer quoi que ce soit.

Du old school vicieux qui envoie la purée sans aucune expérimentation, on va pas se mentir, Watain fait ça foutrement bien, on ne sera d'ailleurs pas très loin de la période Sworn to the Dark dans l'état d'esprit et dans l'exécution, un morceau comme Sacred Damnation montrera un groupe toujours capable de ralentir le rythme quand le besoin s'en fait sentir afin de créer un titre qui va enchaîner tranquillement les passages brise-nuques et le défouraillage à blast-beats qui n'oublie pas les mélodies et les atmosphères, et dans le genre, Ultra (Pandemoniac) se montrera encore davantage vicieux et superbement démoniaque.

Malgré tout, on est quand même dans une exploration, et surtout un recyclage, du Black à la suédoise, il n'y a rien ici dans ce que fait Watain que n'a déjà fait fait auparavant des Naglfar ou des Marduk, et en parlant de Black typiquement suédois, Watain emploie tout un tas de facilités d'écriture, Teufelsreich par exemple sera l'habituelle bonne grosse pompe décontractée du slip et sans aucune gêne de Dissection, alors qu'avec un titre comme The Fire of Power, on est presque au niveau d'une contrefaçon de Bathory où l'on aurait inséré un peu d'ADN de Celtic Frost; Pour moi cet album n'existe que pour deux choses, rassurer les fans qui auraient pu quitter le navire lors de la phase la plus expérimentale du groupe et les pousser à revenir avec une tambouille facile et volontairement orientée trve™, et donner une petite leçon de Black aux nouveaux qui sont arrivés pendant la période la plus mainstream du groupe, car même si Watain fait le gros méchant kvlt avec cet album, il n'en demeure pas moins que le son est assez accessible et ne risque pas trop de choquer, il est parfaitement équilibré pour ne justement pas trop sombrer dans le raw occulte tout en conservant suffisamment d'aspérités pour donner le change et rester ancré dans le Black old school, faisant de Trident Wolf Eclipse un album de roublards  malins qui ont bien étudié leur marché et qui proposent un produit extrêmement référencé et finement calibré pour plaire à tous ses clients, c'est surement la plus grande réussite du disque, parvenir à balancer une tambouille qui fera plaisir à un peu tout le monde sans jamais passer pour des vendus.

Trident Wolf Eclipse n'est pas un grand disque, Trident Wolf Eclipse est juste un bon petit disque de Black bourrin à la suédoise avec juste ce qu'il faut d'éléments trve et de mélodies, un disque concis, frénétique, viscéral, mais aussi très prévisible et il faut bien l'avouer pas des plus intéressants malgré le punch et l'énergie déployée, Watain a fait mieux par le passé, mais il a aussi fait pire récemment, Trident Wolf Eclipse est un bon petit produit correct pour plaire au plus grand nombre afin de fêter dignement l'anniversaire du groupe, il n'y a rien de honteux là-dedans, on y prend même pas mal de plaisir, pas sûr cependant que l'on y revienne souvent.
Track Listing:
1. Nuclear Alchemy  03:07
2. Sacred Damnation  04:41
3. Teufelsreich  04:26
4. Furor Diabolicus  04:43
5. A Throne Below  04:09
6. Ultra (Pandemoniac)  04:01
7. Towards the Sanctuary  04:54
8. The Fire of Power  04:42