jeudi 6 novembre 2014

[Chronique] Ne Obliviscaris - Citadel

En 2012, les australiens de Ne Obliviscaris avaient causé une sacré déflagration dans le petit monde du Metal avec son premier album Portal of I, comment un jeune groupe sorti de nulle part pouvait avoir sorti un album pareil, jouant avec aisance avec tous les codes du Metal extrême, proposant un somptueux mélange de Black flirtant avec le Death et de symphonique sans que l'on puisse vraiment cataloguer le groupe dans un style précis, techniquement irréprochable, novateur et original, notamment par la touche Folk apportée par un violoniste, Ne Obliviscaris avait presque tout bon avec son premier album.
Bien sûr, tout ça n'était pas exempt de quelques défauts, pas mal de longueurs, certains passages un peu trop répétitifs, ou encore un tout petit manque d'émotion, Portal of I était un travail peut-être un peu trop scolaire malgré la réelle volonté du groupe d'aller au delà du simple groupe de Metal extrême à gimmick.
Bref, Citadel était attendu au tournant, et l'on pouvait craindre que ce nouveau disque soit moins bon que le précédent... malheureusement, c'est le cas, enfin, c'est un peu plus compliqué que ça, venez, on s'assoit et je vous en parle...

LA PRODUCTION EST A CHIER!!
Je me doute bien que chez certains ça ne pose absolument pas de problème d'écouter un album surproduit avec plein d'effets clinquants pour vous en mettre plein les mirettes, mais dans ce cas précis, ça m'emmerde, pourtant, on a affaire à un DR9 plutôt engageant et donc pas trop compressé, plutôt dynamique, une production très claire qui rend justice à tous les éléments, surtout que le groupe pratique une musique très riche aux multiples textures, et le fait que tout soit audible sans donner l'impression d'être une bouillie compressée, c'est plutôt sympa, mais qu'est-ce que c'est que ce putain de son de batterie? c'est réellement un humain qui joue? car on croirait entendre une mauvaise boîte à rythmes, organique mon cul, c'est un pur son de batterie en plastique dégueulasse, et ça fait chier.
L'autre problème, c'est l'utilisation d'un son de guitare très moderne, ça parait une bonne idée comme ça, mais ça fait souvent sonner Ne Obliviscaris comme un vulgaire groupe de Tech-Death, et ça, c'est moche.
Ok, je me suis emporté, ce n'est pas vraiment la production qui est a chier, ce sont plutôt les orientations Metal moderne du groupe qui sont gênants, le groupe accumule donc un paquet de défauts sonores, qui étaient déjà présents mais de manière sous-jacente sur Portal of I, et qui éclatent désormais au grand jour, c'est ainsi que Ne Obliviscaris devient un simple groupe de Tech-Death progressif, avec du violon, certes, mais pas grand chose d'autre non plus.
Si vous aviez catalogué Portal of I dans la case Black/Folk progressif, ce qui se tenait à peu près, vous pouvez oubliez cette étiquette, elle est désormais caduque.
Ne Obliviscaris tombe le masque et se transforme en groupe de Death progressif, ce qui pourrait être une super bonne idée si elle n'était pas plombée par le caractère ultra prétentieux de leur musique, qui consiste à être très technique, inutilement complexe, et dont la masturbation intellectuelle ne va nulle part.
L'album d'une cinquantaine de minutes est divisé en trois parties, le triptyque Painters of the Tempest qui occupe la première moitié de l'album, un stand alone de 10 minutes, Pyrrhic, et le diptyque final Devour Me, Colossus.
Wyrmholes et Reveries from the Stained Glass Womb ne servant que d'intro et d'outro mêlant guitare acoustique et violon, on va plutôt s'intéresser au gros pavé que constitue Painters of the Tempest (Part II): Triptych Lux et ses 16'35 au compteur, un très long morceau lui-même divisé en trois mouvements, c'est bien d'employer le terme mouvement, ça fait symphonique, intellectuel, mais ce Triptych Lux ne va pas faire illusion bien longtemps, il s'agit globalement de trois titres que les australiens ont collés ensemble histoire de proposer un titre fleuve, ce qui va s'avérer tout à fait inutile vu le contenu.
Dès le début, on se croirait chez un random groupe de Tech Death, ça attaque très très fort, c'est Heavy, ça tabasse avec du blast beat inhumain, et d'un seul coup, ça sort de nulle part, du violon, avant de repartir pour une nouvelle séquence de bourrinage insensé.
Le problème, c'est que tout dans ce long titre est convenu, le chant clair mêlé au chant clair, check, le break jazzy avec du violon, check, le très long passage progressif atmosphérique à partir de sept minutes, check, le retour du Tech Death et des blasts pour la fin du titre, check aussi, c'est bon, le cahier des charges est rempli, sauf que Ne Obliviscaris est parti d'un point A, a bifurqué dans du Death symphonique et des Breaks jazzy, pour revenir au point A, c'est super, bravo les gars, on est bien avancé maintenant!
La musique de Ne Obliviscaris est ampoulée au possible, surproduite, une musique destinée à en mettre plein la vue mais qui ne repose sur pas grand chose au final, un Tech Death dont la dimension symphonique apparaît vite comme un simple gadget destiné à faire de l’esbroufe et à conférer une dimension épique complètement factice.
Citadel est quand même une sacré entourloupe, car malgré les bifurcations et les changements de tempo, le groupe ne fait qu'une chose, intercaler des passages symphoniques et atmosphériques qui ne sont que des excuses pour en mettre plein la vue avec des accélérations brutales, les structures sont très classiques, et pire encore, la musique de Ne Obliviscaris est atrocement linéaire, prenez Pyrrhic, on est en plein dans du Tech-Death symphonique pendant cinq minutes, enchaîné par un break atmo trop long et qui fait déjà entendu servant de rampe de lancement à un final brutal, niveau d'Epicness: zéro absolu.
Ne Obliviscaris fait ici du mauvais bourrin symphonique, et plus que le Black Metal, c'est la dimension progressive de leur musique qui est passée à la trappe, avec des structures très linéaires et irrémédiablement ennuyeuses, on est dans la pure esbroufe Modern Metal avec un son en plastique pas du tout organique.
C'est dommage car le groupe est capable de bien mieux, les passages symphoniques et atmosphériques sont brillants, parfaitement exécutés, le violon fait passer des émotions très particulières, mais c'est bel et bien toute la partie Metal qui est défaillante ici, et Ne Obliviscaris tombe dans la chausse-trappe du Metal moderne ampoulé qui use et abuse d'artifices sonores comme de la poudre aux yeux, et Citadel est de la vraie masturbation intellectuelle, c'est violent, mais c'est souvent inutilement trop bourrin, et ça devient très vite lourdingue, les mecs de Ne Obliviscaris sont certes d'excellents musiciens, mais en aucun cas de bons compositeurs, le songwritting est particulièrement défaillant, ce qui est un gros problème quand on se lance dans la construction de très longues pièces, qui tournent ici très vite en rond...

Citadel est surement la plus grosse déception de l'année, j'attendais beaucoup de ce groupe, qui a décidé de troquer son Black Folk symphonique progressif pour un Tech Death symphonique complètement con et pénible, pas aidé par une production typée moderne avec un son en plastique.
Alors ouais, ça branle, y'a des breaks jazzy qui devraient ravir les geeks, des passages atmosphériques somptueux, mais l'album ne fonctionne tout simplement pas comme un tout, Ne Obliviscaris est un maître de l'esbroufe qui en fait des tonnes pour vous en mettre plein les yeux, c'est surproduit, ampoulé, sans émotion, sans âme, inutilement complexe au sein de chansons finalement très linéaires, et malgré son caractère direct et violent avec sa foire aux blasts, ainsi que son niveau technique au dessus de la moyenne, Ne Obliviscaris se fourvoie avec un album qui rate sa cible du début à la fin, dommage...

Citadelle en carton
Track Listing:
1. Painters of the Tempest (Part I): Wyrmholes (Instrumental)
2. Painters of the Tempest (Part II): Triptych Lux (Movement I: Creator Movement II: Cynosure / Movement III: Curator)
3. Painters of the Tempest (Part III): Reveries from the Stained Glass Womb (Instrumental)
4. Pyrrhic
5. Devour Me, Colossus (Part I): Blackholes
6. Devour Me, Colossus (Part II): Contortions (Instrumental)