mercredi 16 décembre 2015

[Chronique] Nar Mattaru - Ancient Atomic Warfare

Il y a des groupes qui prennent leur temps, prenez ces chiliens de Nar Mattaru, groupe formé en 1997, premier album Enuma Elish sorti en... 2011, et voici seulement le second quatre ans plus tard, ces mecs sont vraiment des feignasses...
Bref, ce premier album, vous ne l'avez surement pas écouté à l'époque en 2011 puisqu'il est sorti sur un tout petit label, et si vous avez manqué la réédition du bouzin via I Voidhanger, vous devez savoir que Nar Mattaru fait dans le Death à l'ancienne, ouais, ça faisait longtemps qu'on avait pas eu un clone d'Incantation sur ce blog, et bien voilà, on en tient un, sans intérêt me direz-vous, mais non, pas tant que ça, car cette fois-ci, c'est bien, sérieusement, il est cool ce groupe, c'est bien du Death vieille école à la Incantation, mais avec quelques ingrédients en plus dans la grande marmite des influences, ouais, en gros, ils aiment aussi Dead Congregation...

Parmi la multitude de groupes de tâcheron œuvrant dans ce genre-là, et il y en a vraiment vraiment beaucoup, Nar Mattaru, sans révolutionner quoi que ce soit, est dans le haut du panier, ces vétérans savent faire du bon Death à l'ancienne.
C'est quoi la différence entre le bon et le mauvais Death Old School? et bien c'est facile, le mauvais Death Old School, c'est le gars il a une pédale Boss HM2, et il défouraille, mais bon, bof quoi, par contre, le bon Death Old School, c'est le gars, il a une HM2, il défouraille, mais c'est pas la même chose, c'est le bon Death Old School quoi, le mauvais c'est un viandard, le bon, bah c'est un viandard aussi, mais c'est du bon viandard.
Bref, je crois que c'est clair, maintenant que vous avez compris la différence, passons à l'album.

Ancient Atomic Warfare est donc un produit de niche à destination des fans du genre qui n'en ont pas encore marre d'écouter inlassablement des albums de Death vieille école, et ceux-ci ne seront pas déçu par la déflagration sonore offerte par les chiliens; Ici, on aime Incantation, Dead congregation, mais pas que, une petite touche de Sulphur Aeon a été ajouté dans la tambouille, ainsi qu'un paquet d'atmosphères occultes, mais contrairement à pas mal de ses collègues, pas trop de Doom chez Nar Mattaru, qui préfère adopter l'approche frontale et pas mal d'éléments empruntés à Nile ou Melechesh, ouais, c'est du bourrin bien méchant avec souvent une coloration orientale, boucherie-charcuterie en Mésopotamie.

Cette légère inclinaison moyen-orientale, on va la retrouver sur un premier titre en crescendo Funeral in Absu, qui sert en quelque sorte de longue introduction, c'est pas trop bourrin, c'est plutôt particulièrement ambiancé, grâce à d'excellent tremolos, ce morceau, le plus court de la galette, sert d'amuse-bouche avant le premier long titre, The end of the Beginning et ses huit minutes au compteur de défouraillage intense et sauvage, c'est Incantation qui aurait copulé avec Nile lors d'une orgie grotesque et sanglante, ça ne fait pas trop dans le détail, ça sauce, et le petit ralentissement permet au groupe de développer quelques atmosphères pas vilaines du tout, qui seront encore davantage poussées dès le morceau suivant, The Great Serpent of Knowledge, où le Death de Nar Mattaru prend des contours un peu plus massifs, presque plus majestueux, avec des riffs diablement blackisés.

C'est peut-être la différence entre Nar Mattaru et la vile plèbe du Death à l'ancienne, cette capacité à être moins bas-de-plafond que la moyenne, à développer des atmosphères, en utilisant énormément de leads et de mélodies, Declaration of Supremacy portera d'ailleurs très bien son titre, le Death est très violent, un poil blackisé, ça bourre, mais le groupe va lentement s'aventurer vers quelque chose d'autre dans la seconde moitié du morceau, le solo est étrangement clair, apportant une réelle émotion, il y a même de la narration occulte histoire de rendre tout ça encore plus ritualiste, le rythme se fait plus lent, la lead lancinante, et on ne pourra que regretter que le titre éponyme qui suit soit irrémédiablement trop classique et prévisible pour prétendre à autre chose qu'un rôle de filler efficace mais pas franchement passionnant, c'est con car pour conclure, les chiliens nous pondent avec Tribulations of the Gods un titre serpentant très vicieux où certaines leads dans la seconde partie ne sont pas sans rappeler du Paradise Lost période Neandertal, et de la même manière on appréciera la dimension ethnique de l'intro qui ouvre le passage rentre-dedans à la Incantation, du bien bel ouvrage, et un Death particulièrement mis en valeur par une production très organique, pas trop compressé, avec un bon petit DR7.

Tout n'est pas parfait non plus, Nar Mattaru a parfois quelques problèmes dans les transitions entre ses différentes colorations, ce n'est parfois pas très fluide, on passe parfois d'un passage bourrin à un moment plus atmosphérique de manière trop abrupte, et on se demande un peu ce qui se passe.
En dehors de ça, le drumming est implacable, le chant caverneux à souhait bien monolithique convient bien au caractère occulte et massif de l'album, les riffs sont généralement savoureux, accompagnés de leads mélodiques et étrangement subtiles pour ce genre de production, ce qui nous donne un Ancient Atomic Warfare qui, s'il ne va pas changer votre vie, se positionne sans mal dans le haut du panier des sorties underground de Death vieille école, on ne cherche pas ici l'originalité, mais en flirtant avec le Black/Death mésopotamien, Nar Mattaru parvient à nous offrir un bon disque de Death très référencé, solide, efficace, qui saura satisfaire les amateurs du genre, c'est déjà pas mal.