mercredi 12 février 2014

[Chronique] Behemoth - The Satanist

Quand il n'est pas en train de monétiser son cancer, de se taper de la starlette polonaise, de faire le pitre à la télé en tant que juré de The Voice, de jouer les grands méchants dans les tribunaux, et de... toujours monétiser son cancer (y'a pas de petits profits ma bonne dame), Nergal fait du Metal, et il faut bien avouer que depuis quatre ans, on avait tendance à l'oublier un peu, Behemoth avait un peu disparu, la faute à un Nergal omniprésent dans les médias, de part sa leucémie bien sûr, mais surtout par la gigantesque opération de capitalisation qui a suivi, le cancer a fait de Nergal une star, et dans l'économie actuelle, ce petit filou de polonais n'allait pas laisser passer sa chance de se faire un max de blé, c'était de bonne guerre.
Bref, on avait laissé Behemoth en 2009 avec un Evangelion über bourrin mais pas franchement génial, où le Blackened Death des polonais semblait avoir atteint toutes ses limites, à force de se rapprocher du mur du son, Behemoth se l'était un peu pris dans la gueule, et je dois bien vous avouer que je n'attendais absolument rien de bon de ce nouvel album, je voyais mal comment Behemoth pouvait soudainement se réinventer en 2014, où même ne serait-ce que nous sortir un bon disque, dans un sens, j'aurais aimé que ce soit le cas, cela n'aurait été que justice de la part d'un groupe que j'ai beaucoup aimé par le passé, et cela m'aurait obligé à fermer ma grande gueule et à faire acte de contrition devant le génie de Nergal, sauf que non, The Satanist n'est PAS le chef d'oeuvre annoncé par tous les médias depuis quelques semaines...

Ah bien sûr, The Satanist est différent, assez différent de ce à quoi nous avait habitué Behemoth par le passé, car Nergal a eu une idée, cela n'a pas dû arriver souvent chez lui depuis une dizaine d'années, mais cette fois-ci, c'est le cas, une bonne idée même, car surement conscient que jamais il n'arriverait à surpasser ses dernières sorties en terme de surpuissance brute, ce bon vieux Nergal nous fait le coup du rééquilibrage de la formule en déplaçant le centre de gravité de son Behemoth, allez hop, moins de Death de bourrin, et plus de Black, parce que les atmosphères, les ambiances, toussa, ça fera la blague et ça permettra de promouvoir The Satanist comme un album couillu et super profond psychologiquement, ouais mec, avec The Satanist, pénétrez dans l'âme noire du Sataniste Bling Bling Nergal, pour ce qui constituera le chez d'oeuvre absolu des polonais, sombre, obscur, révolutionnaire... rigolez pas, c'est presque comme ça que Nuclear Blast et ses sbires de la com' nous vendent le truc depuis deux mois, et c'est un véritable coup de génie putain! vous ne comprenez pas, The Satanist, avec la nouvelle orientation de Behemoth, est presque aussi bon que le SolarFlesh de Hate... oh wait! même pas en fait, il est carrément moins bon.
Behemoth, cinq ans plus tard, nous propose sa bonne soupe bien grasse à base de Black Metal, en tentant d'être le plus occulte et le plus sombre possible, bah ouais quoi, c'est über Evil, y'a des samples de trompettes et Nergal qui parle en polonais sur de la guitare acoustique, avouez que c'est super flippant et subversif.
A part ça, je ne pense pas avoir besoin de préciser que le son est dégueulasse car une fois de plus le bouzin est sur-sur-sur-sur-sur-produit à l’extrême? C'est une habitude chez Behemoth, proposer un son le plus artificiel possible, mais c'est peut-être encore pire ici, mais un son qui a deux points positifs: On entend enfin la basse d'Orion, ce qui doit bien être une première depuis dix ans, et le chant de Nergal n'a peut-être jamais sonné aussi Raw que sur ce disque, on sent bien toute la haine qui s'échappe de ses cordes vocales, dommage que tout cela soit posé à l'arrache sur une production qui sent le plastique et le fake.
Conséquence de sa nouvelle orientation Black Metal, ce qui est la seule bonne idée de l'album, The Satanist est l'album le plus diversifié de Behemoth depuis bien longtemps, et dans un sens, cette volonté de ne délaisser quelque peu son jusqu'au-boutisme bourrin est plutôt une bonne nouvelle, enfin, cela aurait dû être une bonne nouvelle, car la sauce de Behemoth ne prend jamais véritablement, The Satanist est atypique, certes, mais irrémédiablement foiré et foireux dans tout ce qu'il entreprend, presque, car bizarrement, la fin de l'album est bien mieux réussie que la première partie du disque, et c'est là que l'on trouve les titres les moins typiques de Behemoth.
Putain que la mise en route est laborieuse sur The Satanist, le premier single qui ouvre le bouzin, Blow your Trumpets Gabriel, est une redoutable purge mid-tempo qui semble être un filler non utilisé des sessions d'Evangelion, la violence y apparaît factice, forcée, Inferno tabasse ses fûts comme un damné alors que rien dans le titre ne justifie cette violence, le morceau introduit les samples de cuivres que l'on retrouvera sur un peu tout l'album, la chorale est utilisée pour faire monter artificiellement la tension, mouais, c'est chiant, et dès le titre suivant, Furor Divinus, Behemoth va franchir un pallier supplémentaire dans la violence générique sans intérêt, pour le titre le plus con et bourrin du disque, suivi d'assez près par Amen, la brutalité des polonais n'a surement jamais sonné aussi forcée et vaine que durant ces deux morceaux, dans le genre, Messe Noire aurait pu être vaguement sympa, mais non, car jamais Behemoth ne va parvenir à insuffler le souffre malsain de l'art noir dans sa composition, tout cela manque de percussion, de hargne, et surtout, le sentiment de grandeur démoniaque qui habitait Behemoth par le passé semble avoir disparu de la circulation, pire encore, la première moitié de Ora Pro Nobis Lucifer tire carrément dans le MeloDeath à la Amon Amarth, et c'est à ce moment là que je me demande si Nergal ne se fouterait pas un peu de nos gueules avec cet album, parce que c'est bien gentil tout ça, mais après cinq titres, soit la moitié de l'album, il n'y a absolument rien à retenir de The Satanist et sincèrement, on s'emmerde pas mal jusqu'à maintenant.
Étrangement, après une première partie sans intérêt et, n'ayons pas peur des mots, complètement médiocre par moment, Behemoth va subitement avoir des moments de brillance, pas tout le temps, mais quelques éclairs de génie et des passages particulièrement bluffant et bien foutus, comme le titre éponyme The Satanist qui n'a absolument rien de Death Metal, sorte de ballade Black torturée qui rappellera bien entendu un Shining décomplexé, le morceau est flippant, de même que les hurlements de Nergal, et le bourrinage d'Inferno vers la fin sert à contrebalancer merveilleusement les mélodies misanthropiques, surtout que les samples de cuivres sont ici très bien utilisés pour en maximiser l'effet, et ces ambiances extrêmement malsaines, on les retrouvera sur l'autre très grand moment du disque, le titre de clôture, O Father O Satan O Sun!, l'autre longue ballade Black contemplative de l'album, la voix de Nergal vous prend aux tripes du début à la fin, on sent cette rage, cette noirceur insensée, le titre est mélodique, mais en même temps ultra violent de part les interventions d'Inferno qui accélère toujours aux bons moments, et Behemoth fait preuve d'une redoutable intensité pendant plus de sept minutes, même l'utilisation du chant clair est pleinement justifiée, on regrettera juste que Behemoth n'ait été capable que de deux véritables moments de grâce sur tout l'album, car Ben Sahar n'est rien d'autre qu'un filler sans grand intérêt qui se retrouve plutôt hors de propos ici, alors que In the Absence of Light ne vaut globalement que pour le passage en spoken words en polonais de Nergal, qui me semble un peu là uniquement pour renforcer de manière artificielle le côté théâtral du truc, un peu perdu au sein d'un morceau qui manque d'intensité et qui ne propose rien pour relever la tambouille, de l'émotion un peu trop factice et facile...

Il est quand même bien dommage que Behemoth n'ait pas réussi à développer son Blackened Death atmosphérique au-delà des deux titres cités plus haut, car franchement, Nergal tenait réellement le bon bout dans ce créneau.
On ne peut pas reprocher à Behemoth de n'avoir pas pris de risques, même si cette prise de risque est reléguée dans la seconde partie de l'album et qu'il faille se taper toute une série de titres médiocres avant d'arriver aux pépites atypiques où les polonais s'en sortent globalement pas trop mal, le soucis, c'est que Nergal et c'est potes n'ont jamais réussi à insuffler cette tension dramatique et ce sentiment de misanthropie extrême aux sept autres titres de la galette, où l'on navigue dans des eaux un peu trop familières, pire encore que des titres familiers, ceux-ci ne sont même pas très bons et sont même largement inférieurs aux standards récents imposés par les polonais.
Ce qui nous donne un The Satanist vraiment pas génial, où la banalité et la facilité côtoient quelques moments de grâce qui sortent un peu de nulle part et qui pour le coup, sauvent certains titres de la médiocrité, et surprennent véritablement de part leur approche atmosphérique.
En dehors de cela, on ne peut pas vraiment dire que The Satanist soit une grande réussite, certes, Behemoth a tenté de faire les choses différemment, mais tout cela sonne souvent de manière bien trop forcée et peu naturelle, pour un résultat un peu trop factice et superficiel (surtout que l'imagerie sataniste afin de choquer, ça commence à être usé jusqu'à la corde...), dommage, The MediaWhore... oh pardon, The Satanist, aurait pu être un très bon disque si Behemoth avait assumé sa mutation jusqu'au bout, il n'en est malheureusement rien ici, et l'on a plutôt affaire à de la poudre aux yeux qui permet à peine de masquer toute l'indigence du propos de Nergal...

L' Echec du Sataniste...
Track Listing:
2. Furor Divinus
3. Messe Noire
5. Amen
6. The Satanist
7. Ben Sahar
8. In the Absence ov Light
9. O Father O Satan O Sun!