vendredi 22 août 2014

[Chronique] Khthoniik Cerviiks - Heptaedrone (Démo)

L'été c'est de la merde, en particulier ce mois d'août où les sorties intéressantes se font rares, je vous laisse imaginer mon désarroi quand j'ai réalisé il y a peu que mes seules options de chroniques étaient Dragonforce et Opeth, monde de merde...
Heureusement, en période de vaches maigres, on peut toujours se tourner vers l'underground, car entre des centaines de daubes quelconques, il y a toujours l'espoir de tomber sur une perle, c'est rare, mais ça arrive, parfois, et le petit label allemand Iron Bonehead s'est fait une spécialité de dégoter tout un tas de groupes pas dégueulasses tout du tout, à condition d'être versé dans le Thrash cradingue, le Black et le Death, et ça tombe bien, puisque le groupe qui nous intéresse aujourd'hui est pile poil à la croisée de ces trois genres.
Bref, Khthoniik Cerviiks est allemand est nous propose avec Heptaedrone sa Démo qui rassemble quatre titres déjà parus sur des démos précédentes plus deux inédits et demi (y'a une intro), enfin bon, on peu presque parler de premier album puisque le bouzin dure quand même 43 minutes et que j'ai du mal à imaginer que le groupe ait envie d'avoir une qualité sonore supérieure, car ouais, amis Trve du Kvlt, c'est crade, dégueulasse, poisseux, sauvage, et ô joie, ça sort exclusivement en cassette audio, et c'est toujours une bonne idée de sortir une musique apocalyptique et nihiliste sur un format qui est susceptible de s'autodétruire à tout moment lors de l'écoute...
(Bon, quand même, pour les moins trve, c'est en digital sur bandcamp...)

Et trop de K aussi, mais que voulez-vous, on est dans le Trve Underground et faut faire mystérieux et Evil, il n'était donc pas question d'avoir un patronyme que l'on puisse écrire sans se tromper, de la même manière, vous vous doutez bien que les gars sont des anonymes qui se cachent sous des noms de scène qui dépassent l'entendement, et qui surpassent en terme de ridicule les patronymes des gars de Lvcifyre, car attention les yeux, ça pique, à la basse et au chant (ou comme ils disent, 34" LF Emitter - Main voice sequence), on trouve Okkhulus Siirs, à la batterie (190Bpm V.U.K.K.), Ohourobohortiik Ssphäross, et pour finir, Khraâl Vri*ïl à la guitare et aux vocaux additionnels, soit 82,4Hz-1318,5Hz Azimuth Assonance - Additional voice sequence, je n'invente rien:
Des tonnes de I, de K, de H, et si ça se trouve, Ohourobohortiik Ssphäross c'est l'équivalent allemand des gamines Facebook qui s'appellent LüuCïîe BÎcräâVeùsë 2 Sêntimëêents et on est tous en train de se faire troller par le groupe.
Bref, passons, on met la cassette dans le lecteur en espérant que le lecteur ne bouffe pas la bande, et c'est parti pour une bonne quarantaine de minutes d'une espèce de bande-son des terres désolées post-apocalyptiques, une tambouille de fin gourmet qui carbure au vieux Thrash des années 80, au Death cradingue, et au Black bestial, ouais, c'est du rugueux, du moche et du barbare, décidément, Khthoniik Cerviiks a tout pour plaire, et je ne pense pas avoir besoin de vous préciser que la production est tout ce qu'il y a de plus minimaliste et granuleuse, mais bizarrement pas du tout inaudible, on entend même parfois les déferlements telluriques de la basse, ce qui est toujours plutôt cool, et pour une demo, le son n'est pas du tout faiblard, une production qui conjugue force et minimaliste que ne va que renforcer davantage le sentiment d'effroi et d'oppression qui se dégage d'Heptaedrone.
Profitez bien de l'intro quasi mystique à base de murmures et de sirènes annonçant la fin du monde, car ce sera le seul moment de répit offert par Khthoniik Cerviiks, The Grand Sidereal Swindle va se charger de mettre les choses au point et de montrer de quoi les teutons sont capables, leads vicieuses et ritualistes, attaque Thrashy toute en fureur, et ce chant dégueulasse qui hurle sa haine à la face du monde, Colliding Spheres Bend Solar Years va faire monter l'intensité d'un cran avec des blasts de sauvages et un tempo soutenu en mode pulvérisation de l'univers, et quand le groupe décide de faire une petite pause un poil plus ambiancée, ce n'est qu'une excuse pour en remettre une bonne louche par derrière, efficace comme un coup de pompe dans le derche.
Un peu plus Thrash dans l'esprit, Elektriik Redeemer contient un riff principal directement inspiré par slayer, un morceau plutôt malin qui va prendre quelques détours inattendus, des passages plus appuyés par moment, une basse en liberté qui apporte une réelle densité, et quelques soli de furieux, beaucoup plus simple, Magmatiik Moil étant une grosse baffe dans la gueule sur un tempo insensé.
Malgré cette fureur et la barbarie ambiante, Khthoniik Cerviiks n'en oublie pas les mélodies, elles sont bien planquées, mais il y en a, apportant une lisibilité et un fil conducteur à une musique qui cultive une certaine tendance au chaos, Khthoniik Cerviiks a ce côté magmatique et maelstrom de violence que l'on trouve chez Mitochondrion, un Mitochondrion qui suinterait le Thrash et au côté Raw plus marqué, Black Hole Neurotransmission nous entraîne dans un tourbillon de violence, avec parfois quelques contours Tech-Drone à la Portal, un morceau très long qui fait dans le jusqu'au-boutisme sonore sans véritablement de concession, les ralentissements sont succincts, et ne sont finalement que des passages obligés pour changer de direction, l'atmosphère est dégueulasse, mystérieuse, une sorte de trip mystique et apocalyptique, qui sera encore plus marqué sur l'ultime, et très long, titre de clôture, Moraines of Molten Light (Khthoniik Cerviiks Inhalement) et ses neuf minutes de chaos, les allemands vont nous emmener dans un univers malfaisant, en n'hésitant pas à proposer de très longues plages atmosphériques et Heavy, avec des leads qui vont d'ailleurs une fois de plus faire penser à du Slayer.
Khthoniik Cerviiks utilise une recette assez classique dans sa structure, des passages plus ambiancés, souvent très dissonants, qui alternent avec des parties de Blitzkrieg intenses à très haute vitesse, le groupe sait ménager ses effets et fait preuve d'une maturité assez surprenante, même si on pourra éventuellement regretter des sonorités un peu trop identiques qui apparaissent sur une grande partie des titres, un peu de diversité n'aurait pas fait de mal, mais d'un autre côté, on est dans l'extrémisme sonore, et Khthoniik Cerviiks n'en a rien a branler de votre avis, sa musique est brute, viscérale, son black est primitif, bestial, ses riffs thrash sont aussi acérés que son logo, son Death destructeur, et pour une démo, la maîtrise de ce mélange des genres est assez impressionnante, et surtout, Khthoniik Cerviiks parvient à proposer un truc qui lui est propre avec une redoutable efficacité.

Bien sûr, la musique de Khthoniik Cerviiks est difficile d'accès, parfois un peu rébarbative aussi, mais Khthoniik Cerviiks est sur de son fait pour une première démo à la personnalité affirmée, une sorte de maelstrom über brutal qui ressemble à un Mitochondrion qui aurait copulé avec Slayer, et Heptaedrone est un bâtard cradingue pas si bas-de-plafond que ça malgré sa propension à rentrer dans le lard et à dégommer tout ce qui passe sans distinction.
Khthoniik Cerviiks est un gros méchant trve et Iveul qui ne fera rien pour vous rendre l'écoute de sa démo confortable et facile, sa musique étant une bande son de l’holocauste bien crade et sans concession, dont je ne peux que vous conseiller l'achat de la version cassette pour une écoute optimale, la version MP3 étant un peu trop propre, la version cassette est un peu plus groovy et encore plus granuleuse, et puis c'est plus Trve d'écouter Khthoniik Cerviiks avec un son de merde...

Moche et Méchant