Cela fait déjà cinq ans qu'on avait plus trop de nouvelles de Satyricon, et je ne fais pas vous mentir, ils ne m'avaient pas du tout manqué, d'ailleurs si le dernier titre de The age of Nero, intitulé Den Siste avait été prémonitoire, cela ne m'aurait pas dérangé plus que ça.
Sauf que non, Den Siste ne marquait pas la fin du groupe, juste la fin d'une ère pour l'ancien groupe culte norvégien, la fin du second cycle de Satyricon en fait, car après avoir défouraillé dans le Black pendant les années 90, Frost et Satyr avait plongé la tête la première dans la marmite Black n' Roll à partir de Volcano, point de départ du long déclin de sa créativité, car après ce disque plutôt respectable (et un coup de force commercialement parlant), les choses s'étaient sérieusement gâtées avec Now, Diabolical et The age of Nero.
Un nouveau cycle donc, avec un album éponyme histoire de marquer le coup et pour vous annoncer fièrement ce qu'est Satyricon en 2013, un mauvais groupe de Post-Black...
Bref, oubliez le Black Metal pur et dur, cette fois c'est la bonne, plus grand chose ne rapproche de près ou de loin Satyricon des sonorités abrasives des années 90, et ce nouvel album est l'évolution logique pour le groupe, tellement prévisible comme cheminement, car après avoir tourné en rond comme c'est pas permis pendant trois albums, l'aboutissement était le post-black, il n'y avait pas vraiment d'autres choix possibles.
Le problème de Satyricon ici, c'est qu'il déboule dans un genre qui n'est pas vraiment le sien, avec énormément de retard sur la concurrence, le groupe va donc se contenter de partir de son Black n' Roll, en l'ajustant juste ce qu'il faut pour que cela fasse la blague, allez hop, on ralenti tout ça, encore, et on ajoute quelques breaks atmosphériques, ça fait mystérieux hein? c'est le but.
La grande force de Satyr, c'est d'avoir réussi à convaincre son auditoire qu'il était un putain d'artiste génial qui fait ce qu'il veut et que si vous n'êtes pas content, c'est que vous êtes trop con pour comprendre son art, Satyricon a tellement intellectualisé sa musique qu'il a tout simplement oublié d'en faire, c'est un peu con quand même.
Les trois derniers albums avait ceci en commun qu'ils proposaient des titres atrocement chiant, plats, mais qui se révélaient paradoxalement imparable sur scène, c'est assez bizarre, comme si le groupe était incapable de donner de l'ampleur à ses compositions quand il s'agissait de les enregistrer, ce qui fait que malgré des albums plutôt mauvais, Satyricon a toujours été impérial sur scène, sublimant sur scène des titres médiocres sur album.
D'un point de vue sonore, même avec son nouveau virage stylistique, on reconnait d'emblée la patte Satyricon, le son que l'on qualifiera de "classique" du groupe depuis quelques années, assez rêche, mais en même temps très clair, ce qui donne ce sentiment de simplicité et de pauvreté dans les compositions, car encore une fois, l'album est loin d'être nerveux, faut dire aussi qu'en dehors de compositions ultra faiblardes et linéaires au possible, ce bon vieux Frost carbure une fois de plus au Lexomil.
Ce n'est donc plus du Black, seul le chant de Satyr permet de faire le rapprochement, pire encore, les éléments Black encore présents sonnent ici hors de propos, encore plus maintenant que par le passé, comme des vestiges ou des passages obligés afin de continuer malgré tout à être labellisé black Metal.
Riffs foireux et double pédale, mais cette fois sans la sinuosité du black n' roll typique du groupe, surtout dans sa première partie, car l'album est plus ou moins coupé en deux par un titre, qui sert de pivot à Satyricon, Phoenix, un pur titre de Post-Black avec le chant clair de Sivert Hoyem (Madrugada), sorte de balade pop indie qui pour le coup ne ressemble en rien au Satyricon habituel, ça pourrait vaguement être une bonne idée, sauf qu'on dirait un mauvais titre de Solstafir, ce qui est un peu gênant (une démarche a rapprocher du dernier Watain, qui nous avait lui aussi fait le coup du titre qui sort de nulle part au beau milieu du disque avec They Rode On), Phoenix est mauvais, avec surtout un chant ne colle pas du tout, complètement hors de propos.
La première partie est donc la plus "expérimentale", tout du moins pour Satyricon, avec un post-black à la croisée des chemins entre le Doom et l'atmosphérique, et c'est d'une platitude abyssale sur Tro Og Kraft et Our World, it rumbles tonight, c'est long, c'est linéaire, plat, avec la batterie d'un Frost qui semble se faire chier, et des sonorité un peu Rock Vintage qui rappelle un peu Ghost, sans la capacité d'accroche des hommes masqués malgré tout, le groupe joue sur des atmosphères, prend le temps de s'installer, mais ne semble avoir aucune putain d'idée de la direction où aller, rien pour se raccrocher non plus, on attend vainement un passage qui nous ferait sortir de notre torpeur, a peu près rien ne fonctionne sur ces deux titres, et il faudra attendre Nocturnal Flare pour se dire que Satyricon était en fin de compte capable de pondre un bon titre dans ce genre nouveau pour lui, car cette fois-ci, les atmosphères collent parfaitement aux riffs, la musique du duo se fait plus sinueuse, attirante, plus aérienne également, un aperçu de ce qu'aurait dû être l'album, car malheureusement, la suite sera largement inférieure et quasiment banale.
A croire que le groupe n'assume pas totalement son virage, après Phoenix, Satyricon nous sort un titre quasi Black avec un Walker Upon the Wind posé là à l'arrache, sans trop savoir pourquoi, un titre heavy très lourd, noir, pas dégueulasse, avec une grosse reprise qui décoiffe après le trop long passage atmosphérique, j'avais presque envie de gueuler Ultimate Destroyer avec Satyr tiens.
Je vous parlait de Ghost un peu plus haut, difficile de nier la référence avec Nekrohaven, où Satyricon fait dans le Rock vintage blackisé, surtout les leads qui semble tirés d'Opus Eponymous, c'est pas forcement génial mais c'est pour le coup plutôt surprenant, et en fait assez pathétique de la part du duo norvégien, car cela renforce l'idée que les gars n'ont absolument aucune idée de où ils vont, alors ils essaient un peu tout et n'importe quoi, en espérant que ça marche, et après un Ageless Northern Spirit aux forts relents de Volcano, c'est le retour du doom atmosphérique pour le très long The Infinity of time and Space, presque huit minutes où l'on se demande une fois de plus où le groupe veut en venir, un peu à l'image de l'album en lui-même, en plein paradoxe...
Si vous êtes un fan de Black, passez votre chemin, même si j'imagine que les blackeux ont depuis bien longtemps laissé tomber l'affaire, car Satyricon n'est tout simplement pas un album de Black Metal, on est plutôt en présence d'un album de post-black tout à fait médiocre, au mieux passable, proche du Doom et de l'atmosphérique, avec des sonorités Rock Vintage, pas vraiment une oeuvre aboutie, car j'ai le sentiment d'écouter un brouillon de ce que sera Satyricon par la suite, comme si le virage n'était pas totalement assumé, et qu'il fallait à tout prix continuer de sonner Black Metal, même si l'envie n'est clairement plus là.
Pas grand chose à retenir de cet album, c'est encore plus plat et chiant que d'habitude, et j'en viens même à regretter le Black n' Roll des derniers albums, d'ailleurs, il va falloir que Satyr et Frost se décident vraiment quant à la direction à prendre, car ils sont un peu le cul entre deux chaises et cela se ressent dans leur musique, mais bon, je dois surement être trop con pour comprendre leur art...
Foiré et foireux...
Track Listing:
1. Voice of Shadows (Instrumental)
2. Tro og kraft
3. Our World, It Rumbles Tonight
4. Nocturnal Flare
5. Phoenix
6. Walker upon the Wind
7. Nekrohaven
8. Ageless Northern Spirit
9. The Infinity of Time and Space
10. Natt (Instrumental)