Malgré sa très très longue carrière, le groupe allant tranquillement sur ses quarante ans, il est facile de résumer ce qu'est Accept au travers d'une période précise, celle allant de 82 à 86, avec quatre albums qui sont devenus de véritables classiques du Heavy Metal, Restless and Wild, Balls to the Wall, Metal Heart, et Russian Roulette, c'est précisément là où les allemands étaient au top de leur jeu.
Wolf Hoffmann est un malin qui a très bien compris que c'est le Accept que les fans veulent entendre, pas possible de ramener Udo Dirkschneider? pas de problème, on embauche un inconnu qui sonne comme le nain teuton à sa grande époque, faire un album de reformation en 2010? aucun soucis, il suffit de reprendre tout ce que faisait Accept de 82 à 86 en actualisant un peu le truc et en lui greffant une production moderne et puissante, et ça a fonctionné, Blood of the Nations était un excellent disque qui permettait aux allemands de faire un retour aussi fracassant qu'inespéré, c'était le moment pour Hoffmann d'enclencher le mode recyclage et de s'engager sur la voie de l'immobilisme, car Stalingrad était à peu de choses près du même tonneau, et vous savez déjà ce qui vous attend même avant d'écouter Blind Rage, vous vous imaginez bien qu'en sortant des albums tous les deux ans, Accept est plutôt là pour occuper le terrain plutôt que de partir à l'aventure...
Riffs agressifs, refrains rentre-dedans, chœurs guerriers en Ohhh oooh ooooh, rythmiques rigoureuses typiquement germaniques, mid-tempo implacables, ouais, Blind Rage propose encore du pur concentré d'Accept qui saura ravir ceux qui ont aimé Blood of the Nations et Stalingrad, sauf que cette fois-ci, on a quand même le sentiment qu'Hoffmann est un peu à sec au niveau des idées, bon, ok, c'est pas comme si il en avait eu de nouvelles depuis la reformation, mais il était suffisamment habile pour masquer correctement l'entreprise de recyclage Accept, avec Blind Rage, le recyclage est un poil plus flagrant.
Cette impression est peut-être renforcé par le fait que Blind Rage s'inscrit dans une optique moins dure que ses deux prédécesseurs, et l'on va trouver plus de mid-tempo, ce qui va donner à l'album un petit côté mollasson, ce n'est pas forcément dramatique, mais je dois vous avouer que je préfère largement quand Accept envoie la sauce.
Dans le genre du titre d'ouverture ouais, car Stampede contient tout ce que j'apprécie chez Accept, de l’agressivité, du mouvement, du dynamisme, rien à redire, Accept assure l'essentiel avec un morceau furieux et accrocheur, Tornillo continuant de prouver album après album qu'il est un remplaçant tout à fait crédible à Udo, dans un registre parfois plus varié que le nain.
Dying Breed va proposer un tempo plus ralenti pour un morceau plus massif et sombre, avec de gros chœurs grandiloquents à la Blind Guardian, pour l'instant, ça démarre bien, sauf qu'arrive Dark Side of my Heart dont l'intro est auto-pompée sur celle d'Up to the Limit (Metal Heart), et ce ne sera pas la seule fois où l'on se demandera où on a déjà entendu tel ou tel passage, ce qui est toujours un peu gênant, par exemple, le très Hard Rock ultra radio-friendly From the Ashes we Rise a de forts relents de Bulletproof (Objection Overruled), je ne vais pas vous dresser la liste des redites et des clins d’œil très appuyés au passé, mais vous avez saisi le principe, Blind Rage est blindé de ce genre de moment de recyclage, ce qui n'était pas gênant auparavant le devient un peu ici, et cela donne le sentiment qu'Accept à tenté de nous refaire un Metal Heart part 2 plutôt qu'un nouveau disque.
Ce qui est un peu pénible, ce sont les mid-tempo ultra prévisibles à la Fall of the empire et ses chœurs que l'on voit arriver à des kilomètres, un The Curse trop long et monotone pas aidé par un refrain quelconque, ou l'espèce de Power ballade Wanna be Free, avec encore une utilisation systématique de chœurs fédérateurs, ce qui devient un peu lourd à la longue.
Heureusement, il n'y a pas que ça non plus, avec Trail of Tears les allemands nous proposent un bon petit brûlot de Power Heavy galopant pas vilain du tout, 200 Years, très Heavy, va compter sur un bon refrain très accrocheur et un peu différent de la pitance habituelle, et alors que Bloodbath Mastermind est un filler acceptable, Final Journey va se charger de conclure l'album sur une note assez haute en lorgnant très fortement du côté de chez Judas Priest, avec des leads plutôt épiques.
L'un des problèmes de Blind Rage, c'est surement sa longueur un peu excessive, 58 minutes quand même, ça fait beaucoup pour un groupe qui recycle pas mal, c'est dommage, car avec trois titres de moins et une durée de 40-45 minutes, l'album aurait été bien plus concis et sympa, vous me direz que cela permet au groupe de proposer un album très varié, mais la faible qualité de certains titres rend surtout l'album assez moyen.
On ne dira pas que Blind Rage est un mauvais disque, au contraire, il est même assez bon, mais c'est le troisième album post reformation, et on ne vois aucune perspective d'évolution pour un groupe qui se contente de nous refaire le même coup qu'avec Blood of the Nations, sauf qu'il y a moins d'idées et moins d'inspiration, surtout que l'effet de surprise ne joue plus en faveur des allemands, même d'un point de vue sonore, on est en terrain connu puisque c'est une fois de plus Andy Sneap qui s'est occupé de la production, et fournit à Blind Rage un son clair et puissant, désormais habituel de cet Accept 3.0, un album au contenu bien trop convenu pour qu'il ait le même impact qu'en 2010.
Blind Rage joue dans la même cour que ses deux prédécesseurs, avec une différence de taille, il est moins bon, et Accept donne ici plus le sentiment de regarder en arrière plutôt que vers l'avenir, ce qui s'avère parfois gênant pour les nombreuses redites flagrantes qui s'ajoutent au recyclage habituel de ce fleuron de l'industrie métallurgique teuton.
Il n'y a rien de honteux là-dedans, après tout, on parle d'un groupe que va sur ses quarante ans, ce n'est pas aujourd'hui qu'il va se réinventer, et le recyclage est plutôt la norme dans ce genre de groupe, seulement voilà, Accept était un peu plus malin lors de Blood of the Nations et Stalingrad, et l'on ne ressentait pas vraiment ce sentiment de déjà-entendu, ou tout du moins on y faisait pas trop attention, avec Blind Rage, ce n'est pas la même histoire, le disque est varié, mais pas suffisamment inspiré pour faire illusion bien longtemps, souffrant d'une certaine irrégularité, avec des hauts et des bas, il ne parvient pas à maintenir un nouveau constant sur une durée un peu trop excessive.
La seule chose à retenir est que même en n'étant pas trop inspiré, Accept parvient à maintenir un niveau acceptable, où il suffit juste d'élaguer un peu et de virer deux-trois morceaux médiocres pour avoir un disque correct, Accept occupe le terrain avec un blind Rage qui semble précipité et un peu bricolé à l'arrache, de quoi justifier une tournée de plus sans décevoir les fans, mais trop convenu et prévisible pour qu'on y revienne souvent, surtout qu'il n'est pas aidé par une orientation plus mollassonne, ce qui n'est jamais une bonne idée chez Accept...
Bland Rage
Track Listing:
1. Stampede
2. Dying Breed
3. Dark Side of My Heart
4. Fall of the Empire
5. Trail of Tears
6. Wanna Be Free
7. 200 Years
8. Bloodbath Mastermind
9. From the Ashes We Rise
10. The Curse
11. Final Journey
