C'est un peu triste que The Third and the Mortal n'existe plus, bon, cela fait déjà plus de dix ans mais le groupe a laissé un vide chez tous les amoureux de Doom aux penchants atmosphériques et avant-gardistes, heureusement que ce bon vieux Trond Engum est encore là avec son projet solo The Soundbyte pour entretenir la flamme car ses anciens collègues n'ont pas été très actifs depuis le split, Solitary IV est donc, comme indiqué subtilement dans le titre du disque même si les précédents ne s'appelaient pas Solitary, le quatrième album du projet, et autant vous prévenir tout de suite, on ne sera pas forcément dans le monde du Metal avec ce disque, enfin, un peu quand même, mais sans y être vraiment...
Pourtant il va être difficile pour Trond Engum d'éviter les comparaisons avec son ancien groupe puisqu'il est accompagné à la batterie de Rune Hoemsnes, ancien batteur de The Thrid and the Mortal donc, et de la chanteuse de Jazz Kirsti Huke, qui avait accompagné T3&TM dans ses dernières années, pourtant, Solitary IV n'est pas un album de The Thrid and the Mortal, allons bon, il n'est même pas un album de Metal, alors ça va être compliqué, mais il n'en demeure pas moins que des ponts existe entre son ancien groupe et ce nouvel album de The Soundbyte, d'une certaine manière, The Soundbyte est surement pour Engum une sorte d'extension sonore de son ancien groupe, où, libéré de toutes contraintes, il a tout loisir d'expérimenter et de créer.
Solitary IV est inclassable, et est bien évidemment à classer dans la case fourre-tout de l'avant-garde, mais pas n'importe lequel, l'atmosphérique expérimental qui privilégie l'approche contemplative à base de nombreux bidouillages électroniques et de longues et minutieuses descriptions de paysages sonores, autrement dit, ça va être plutôt hermétique et il va falloir faire preuve d'une certaine ouverture d'esprit pour apprécier la chose, ah, et sinon ouais, ça ressemble quand même pas mal à The Third ans the Mortal.
Enfin pas tout le temps non plus, The Soundbyte fonctionne par références, avec des racines, un socle qu'il utilise pour vagabonder et expérimenter avec d'autres sonorités, prenez par exemple Fanfare, le titre d'ouverture, avec son drumming hypnotique d'inspiration industrielle qui rappellera bien évidemment qui vous savez mais qui penchera malgré tout vers une sorte d'Ulver période Blood Inside, avec son utilisation de cuivres apportant une certaine chaleur contrebalançant la froideur naturelle de l'indus, il sera d'ailleurs également question d'industriel avec un Descending fortement teinté d'électronique et de chant aérien et éthéré en opposition avec un riff plutôt lourd pour une marche Doom martiale du plus bel effet, North reprendra quelques langoureuses mélodies Doom qui seront subtilement mêlée avec de l'électronique et du Doom/Folk sublimé par le chant de Kristi Huke.
Si jusqu'ici les choses ont été plutôt faciles à suivre, The Sounbyte va progressivement s'engouffrer dans le bizarre et l'expérimental, et si Lamentations contient encore la ligne directrice mélangeant Indus/Electronique/Doom/ambient, avec une très sérieuse propension à naviguer dans le Doom mélodique et mélancolique, Floating, avec son chant folk fragile et délicat sur un drumming tribal, mais surtout Estranged seront très proches de l'expérimental plutôt hermétique, Estranged étant surement le plus bizarre du lot mais Engum aura la bonne idée de ne pas trop en faire, d'expérimenter avec des sonorités étranges sur une courte durée, le morceau servant d'ailleurs de connecteur avec un ultime titre, Solitary, très proche du Doom/Folk atmosphérique de The Third and the Mortal, peut-être le morceau le plus "classique" du disque, que ce soit dans la forme ou dans le fond, avec sa structure très simple mais efficace, le fait qu'il ait été utilisé comme single pour promouvoir le disque n'a rien d'étonnant puisqu'il est le plus enclin à attirer l'attention des amateurs de The Third and the Mortal.
La plus grande réussite de The Soundbyte est d'être parvenu à pondre un disque très atmosphérique et expérimental sans être jamais ennuyeux ni trop hermétique, bien aidé en cela par une production impeccable rendant l'ensemble particulièrement dynamique, mettant en valeur la science de Trond Engum lorsqu'il s'agit de peindre avec précision ses paysages sonores pas avares de motifs et de mouvements.
Solitary IV est un bon disque, hypnotique, classe, aventureux, avec juste ce qu'il faut d'excentricités et d'expérimentations pour maintenir constamment l'intérêt et titiller notre curiosité, est-il un très grand disque? je ne le pense pas, mais n'être que "juste" un bon disque n'a franchement rien de déshonorant dans le contexte présent, dans tous les cas, si vous voulez un bon fix de Doom mélodique Avant-gardiste expérimental, ou alors que vous appeliez ça du post-machin, The Soundbyte fait le boulot avec talent, que ce soit du Metal ou pas.
The Fourth and The Mortal