Après plusieurs années de calme relatif, avec la mise en sommeil de ses nombreux projets, et le ralentissement du rythme des sorties de son principal projet solo (encore que, c'est un duo depuis un bout de temps déjà), Mr V, alias Andreas Hedlund, (également très occupé par Borknagar, qui nous a déjà sorti une monstrueuse galette cette année), semble depuis un an débordant de créativité, puisqu'en dehors de cet Orkan, faisant suite à un excellent Jordpuls sorti l'année dernière que j'avais chroniqué, des rumeurs circulent concernant d'éventuelles nouvelles sorties d'Otyg et de Cronian, autant dire qu'on en a pas fini avec le suédois cette année.
Toujours accompagné de son fidèle lieutenant Mattias Marklund, Vintersorg nous délivre donc avec Orkan le second volet d'un concept sur les quatre éléments, continuant dans le même style défini lors de l'album précédent, mais avec heureusement quelques légères différences, pour simplifier, ça ressemble beaucoup à Jordpuls, mais c'est pas tout à fait pareil...
Jordpuls (pulsation de la terre, ou un truc comme ça en suédois) était l'album de la terre, marquant un retour aux racines du groupe après de nombreuses années d'expérimentations diverses, un disque qui allait plus loin que Solens Rötter, redéfinissant le Son du duo suédois, pas vraiment une marche arrière, mais une recherche de l'équilibre entre ses aspirations progressives et ses racines Black/Folk.
Ayant justement trouvé cet équilibre, sans surprise, Orkan (Ouragan), soit l'album de l'Air, poursuit sur la même voie que son prédécesseur, stylistiquement parlant, mais en réussissant malgré tout à éviter la simple redite, avec des atmosphères différentes, de par son thème, Orkan se veut plus... aérien (duh!), avec cet amalgame entre passages agressifs et moments planant, Orkan est également moins compact que ne pouvait l'être Jordpuls, s'offrant de nombreux espaces contemplatifs, éthérés, au sein de compositions complexes et légèrement plus longues que d'habitude, avec notamment trois titres dépassant les sept minutes.
Vintersorg ne change donc pas son fusil d'épaule, on retrouve sans mal le son développé par le groupe récemment, des titres mélodiques, avec ses passages prog/folk typiques, les riffs black en soutien du chant toujours impeccable de Mr V et de ses refrains toujours aussi catchy, avec également les mêmes petits défauts que j'avais souligné sur l'album précédent, une basse qui a tendance a sérieusement errer (je trouve sincèrement qu'il manque un spécialiste au poste de bassiste), et une fois de plus, on a droit à une batterie programmée, ok, à force, on s'y habitue, et c'est plutôt l'utilisation d'un vrai batteur humain qui est anormale pour le groupe, mais il va de soi que le rendu manque d'un peu de feeling et de chaleur, c'est donc un parti pris du groupe (ça doit aussi coûter moins cher...) et je ne crois pas que ça changera à l'avenir, faut faire avec ma bonne dame, fort heureusement, on oublie assez vite ce son de batterie grâce à une production impeccable, clean tout en ayant ce petit côté raw qui sied tant à la musique du groupe.
La différence avec Jordpuls est donc cette vibe atmosphérique plus prononcée, en rapport avec son thème, où Vintersorg nous dépeint avec un certain brio des paysages d'une incroyable beauté au sein d'une espèce de chaos organisé, avec des titres à l'image du vent, parfois apaisant, parfois violent, Orkan est un disque de grands espaces, complexe, difficilement domptable, ou la force destructrice côtoie de longues plages introspectives, sur lesquels on se laisse transporter avec plaisir.
A l'inverse du titre d'ouverture de Jordpuls, c'est par du chant clair que s'ouvre Orkan, avec un Istid au tempo rapide, naviguant au gré de ses accélérations rageuses et de ses changement de rythmes, avec un ingénieux passage atmosphérique à base notamment de flûte et d'orgue aux sonorité seventies, notons également, ce qui sera récurrent sur l'album, un refrain qui vous happe totalement, les ohohohohoh typiques de Mr V, et un excellent solo.
Une entrée en matière malgré tout assez classique pour qui connait un peu le groupe, mais qui nous amène dans les meilleures conditions possibles vers les deux premiers pavés de sept minutes, Ur Stjärnstoft är vi Komna et Polarnatten, qui voient Vintersorg nous emmener dans une sorte de voyage épique aux multiples textures, où le groupe prend le temps de développer ses ambiances, avec ses breaks folk atmosphérique et ses passages black bien rentre-dedans, et là ou vintersorg fait fort, c'est qu'à aucun moment le soufflet ne va retomber, produisant le même niveau de qualité jusqu'à la fin, citons notamment le très calme Myren, ou encore la chanson titre, Orkan et son refrain incroyable, avec cette vibe old school rappelant Cosmic Genesis.
Une bonne surprise vers la fin de l'album, car Norrskenssyner marque le grand retour de Cia Hedmark, qui n'était plus apparu sur un album de Vintersorg depuis Ödemarkens Son, et je dois avouer que ça fait plaisir de retrouver un peu de chant féminin, surtout qu'elle apporte une vrai valeur ajoutée au titre, tout en délicatesse et en émotion...
Vous l'aurez compris en lisant cette chronique, quinze mois après Jordpuls, Vintersorg nous gratifie une nouvelle fois d'une performance de haute volée avec Orkan, même si, comme son prédécesseur, il n'est pas exempt de quelques petits défauts.
La basse et la batterie, bien sûr, je m'en suis expliqué plus haut, mais on pourrait aussi reprocher à Vintersorg de mettre de côté toutes velléités de recherche sonore et d'expérimentation pour se concentrer uniquement sur une formule qui fonctionne, car même si Orkan se démarque de Jordpuls, il n'en demeure pas moins que les différences soient assez minimes et qu'à la première écoute, il est soit difficile de les différencier.
Malgré tout, Orkan est un excellent disque, inspiré, épique et cohérent malgré ses structures complexes et ses multiples textures, et c'est bien le plus important...
Brillant, mais pas forcément indispensable...
4.5 / 5