Je me rappelle quand était sorti Surtur Rising en 2011, j'avais pris la décision de ne pas le chroniquer en disant, c'est toujours la même chose, je n'ai pas grand chose à en dire, deux ans plus tard, avec ce nouvel album, c'est toujours la même chose, je n'ai toujours pas grand chose à en dire, mais je vais vous le dire quand même, c'est un peu idiot, mais c'est exactement ce que fait Amon Amarth depuis des lustres.
Je sais, cette chronique démarre mal, et je vois déjà les fanboys sortir les haches, mais il faut dire les choses comme elles sont, Amon Amarth est un groupe pratiquement un immobilisme presque total, qui fait de lui une sorte de AC/DC du Death mélodique, avec malgré tout une certaine constance qualitative, tous les deux ans en moyenne, on y a droit, les vikings descendent de leur drakkar pour piller les terres avec un nouvel album sous le bras, l'occasion de remplir les caisses, les leurs et celles de Metal Blade, car après tout, cette joyeuse troupe de guerriers suédois n'a jamais était aussi populaire que maintenant, surtout depuis leur conquête du marché américain, et ses consommateurs friands de clichés guerriers nordiques, l'occasion d'écouler du merch, des éditions limitées en pagaille et même des coffrets avec des bustes de Loki en plastique, et avec la sortie de ce nouvel opus, ce n'est pas prêt de changer, car Deceiver of the Gods ne décevra personne tant il est dans la ligne droite de ses prédécesseurs...
C'est ainsi, tout ce qu'on attend d'un nouvel album d'Amon Amarth, c'est une dizaine de titres de Death Metal mélodique qui poutrent, épiques, avec un équilibre respecté entre violence, force brute, et ce qu'il faut de mélodies accrocheuses, avec aussi suffisamment de variété pour qu'on ne s'ennuie pas sur la durée, et c'est à peu près tout.
Ne vous méprenez pas, j'adore Amon Amarth, mais ne vous attendez pas à une quelconque surprise venant de suède, d'ailleurs, quand on y regarde de plus près, toute l'essence de ce qu'est Amon Amarth est contenue dans leur premier album, Once sent from the Golden Hall, le disque fondateur, les albums suivant n'en étant que le prolongement, avec un dosage variant au gré de leurs envies, soit ultra brutal, soit avec une orientation plus mélodique, mais leur formule n'a pas changé depuis plus de quinze ans, une recette qu'ils appliquent quand même avec un certain brio, car il n'est pas donné à tout le monde de continuer à sortir des albums de qualité tout en pratiquant cette forme d'immobilisme, après tout, tant que ça marche, ils auraient tort de se priver, il ne sert à rien de réparer une machine qui n'est pas cassée.
Il parait quand même que les suédois ont pris des risques et se sont mis en danger pour celui-ci... ouais, en fait, ils ont juste changer de producteur, exit Jens Bogren qui avait produit les trois disques précédents, et bienvenue Andy Sneap, ce qui ne va pas changer grand chose au son du groupe, entendons-nous bien, Sneap ou Bogren, c'est comme choisir en Quick ou McDo, le nom est différent, mais le contenu est identique, bref, une production claire, lisible, ultra puissante, rendant justice aux velléités épiques et guerrières du groupe, même si bien sûr, ça sonne très moderne et un peu compressé, il est loin le temps des productions raw des permiers albums.
L'autre "changement" se situe au niveau des thèmes abordés, c'est cette fois-ci Loki qui est à l'honneur, super non? Bref, une fois de plus, l'occasion de nous conter des légendes nordiques et de nous décrire des scènes de batailles, comme à l'accoutumée, pour résumer, le fond et la forme ne changent pas, et l'Edda est un ouvrage suffisamment riche pour encore fournir matière à une bonne dizaine d'albums.
Une fois de plus, on a droit à du gros Death Metal avec des poils, viril, épique, je parle bien de Mélodeath hein, Amon Amarth n'est pas un groupe de Viking Metal, encore moins un groupe de Pagan, Amon Amarth fait juste du Death qui parle de viking, c'est tout, c'est leur concept et la base de leur imagerie, et tant pis si on tombe dans tous les clichés inhérents à l'imagerie populaire que l'on se fait des vikings, de fiers guerriers barbus et chevelus armés de haches et de casques à pointes, mais c'est ce qui plait aux fans et ce qui donne un côté fun au groupe, vous pouvez prononcer le mot viking à côté de n'importe quel fan de Metal, il pensera automatiquement à Amon Amarth, comme quoi la marque Amon amarth est désormais bien ancré dans l'inconscient collectif.
Musicalement, tout ce que vous attendez d'un album d'Amon Amarth est présent, du riff de gros bûcheron qui tabasse, du solo mélodique plein de panache qui sert à transmettre des émotions, qu'elles soient épiques ou mélancoliques, une section rythmique en béton armé, avec notamment le toujours impeccable Fredrik Andersson, un batteur que j'ai toujours apprécié pour sa capacité à ne jamais en faire des tonnes, il frappe fort, c'est simple, carré, ultra efficace, et bien sûr, la cerise sur le gâteau, le gros growl de sauvage de Johan Hegg, l'une des voix les plus reconnaissable du Death Metal, aussi l'un des plus charismatiques sur scène, alternant entre le chant écorché et le chant death typiquement guttural et profond.
Deceiver of the Gods nous présente la formule habituelle du groupe, ce Melodeath duquel surgissent parfois des influences Thrash ou typiquement Heavy Metal, avec juste ce qu'il faut de variété, et toujours cet équilibre entre les titres les plus violents et les mid-tempo heavy très mélodiques, car après tout, faut pas déconner, sous la barbe et les armures, il y a un petit cœur de viking sensible et plein de tendresse qui bat.
Et des titres guerriers et directs dans ta face, il y en a le quota habituel, le titre d'ouverture qui donne son titre à l'album est particulièrement consistant et révélateur de l'immobilisme du groupe, Amon Amarth est d'ailleurs un récidiviste dans le titre d'ouverture qui défonce, et il est à noter que le reste sera du même niveau, même si évidemment, tout cela sonne comme du déjà entendu, une jolie collection de titres assez réussis, confortables et efficaces, comme si le groupe pondait tous ses titres dans l'optique de les jouer en live.
Tout ceci est bien sûr atrocement prévisible et convenu malgré la qualité des chansons, avec des gimmicks plutôt gênant, surtout dans les gros choeurs guerriers (le grandiloquent et épique Father of the Wolf) et les paroles qui parlent encore et toujours de vikings, combien de fois encore on va se taper des titres comme We shall Destroy ou Coming of the Tide (malgré un bon petit solo heavy Maidenien, peut-être le meilleur du disque), qui donnent l'impression désagréable d'une redite pure et simple, ou encore un Blood Eagle en forme de collection de clichés malgré sa courte durée, sample d'une hache qui pénètre un crâne sur le champ de bataille et les hohohohoho d'usage vers la fin, les suédois aiment bien aussi le mid tempo heavy et mélancolique pour nous conter des histoires de guerre, et c'est cette fois-ci Under siege qui s'y colle, une longue balade guerrière toute en nuance, mais on y a droit à chaque album, bref, des surprises, il y en aura peu, mais quand même un bonne avec un Hel surprenant pour l'alliance entre deux vocalistes totalement opposés, Hegg et l'ancien Candlemass Messiah Marcolin, et pour le coup, le duo fonctionne à plein régime, sur un titre pesant et menaçant avec des chœurs grandioses utilisés avec parcimonie, lui donnant un petit côté doom pas désagréable, bluffant et surprenant d'entendre du vrai chant clair sur un titre d'Amon Amarth, la seule surprise de l'album en fait, car ce n'est pas avec le dernier titre qui se distingue par sa longueur que vous allez en trouver, ce n'est pas la première fois que le groupe nous fait le coup du titre fleuve, mais Warriors of the North et ses paroles débiles gavées de clichés n'a ni le panache d'un Victorious March ni la classe d'un And Soon the world will cease to be, juste un titre final bien trop long et qui se répète un peu trop...
Du recyclage, de la redite, du recyclage, pas de doute, vous êtes bien en train d'écouter le nouvel album d'Amon Amarth, une nouvelle livraison de titres de Melodeath efficaces et épiques, et rien de plus, avec tous les clichés habituels sur l'imagerie viking et des paroles un peu bas-de-plafonds, d'ailleurs en parlant de clichés, heureusement que musicalement la qualité est une fois de plus au rendez-vous et que l'album tienne encore à peu près la route, car en cas de grosse baisse d'inspiration, Amon Amarth risque de devenir aussi risible et kitsch que Manowar, le genre de groupe dont on ne retient que les clichés et les gimmicks.
Deceiver of the God est juste à prendre comme il est, un album de plus, et le respect total du cahiers des charges du groupe, une bonne excuse pour emmener le drakkar en tournée aux quatre coins du globe pour vendre du merch (heureusement que je groupe est bien plus impressionant sur scène que sur album d'ailleurs...), mais attention, les récifs se rapprochent, et même si pour le moment les suédois sont parvenus à poursuivre leur route sans encombres, on risque de frôler le naufrage dans pas longtemps si le groupe continue comme ça en pleine ligne droite.
Pas encore l'album de trop, mais un disque prévisible, trop prévisible pour être vraiment digne d'intérêt, et qui n'apporte rien du tout à la discographie déjà conséquente du groupe, reste un album de Melodeath épique et guerrier sympa à écouter, conforme à la longue tradition du groupe, du gros son et des poils, on se revoit dans deux ans, je pourrais surement ressortir exactement la même chronique en plus...
And again, and again, and again...
3 / 5
Track Listing:
1. Deceiver of the Gods
2. As Loke Falls
3. Father of the Wolf
4. Shape Shifter
5. Under Siege
6. Blood Eagle
7. We Shall Destroy
8. Hel
9. Coming of the Tide
10. Warriors of the North