On pourra toujours dire que Life of Agnony a sorti deux très bons disques il y a plus de vingt ans avant que sa carrière ne parte complètement en couilles, deux bons disques ouais, pas des disques géniaux hein, juste deux albums d'alternatif collant parfaitement à leur époque, River Runs Red en 93 et Ugly en 95, une époque où justement la scène de New York était en ébullition et fournissait tout un tas de combos dérivés du Hardcore qui fusionnait avec tout ce qui passait dans le coin, du gothique, du hip-hop, de l'électronique, ou dans le cas de Life of Agony, du Grunge, et on a bien cru que la carrière du groupe allait à tout jamais se résumer à ces deux premiers albums, car à partir d'un Soul Searching Sun en 1997 plutôt mauvais qui avait pris les fans au dépourvu, tout est parti en vrille avec les multiples allées et venues de Keith Caputo et de ses problèmes personnels, un split suivi d'une reformation et la sortie de Broken Valley en 2005 suivi d'un nouveau split et d'une nouvelle reformation il y a trois ans, bref, un beau bordel qui fait qu'on espérait pas grand chose d'un nouveau disque de Life of Agony.
Une carrière chaotique, un parcours pas facile à suivre, des orientations musicales douteuses et des échecs, ça explique pourquoi Life of Agony n'a jamais véritablement percé durablement sur le marché mainstream, se contentant d'être un groupe de niche où même au top de sa gloire il était petit par rapport aux autres, mais un groupe attachant malgré tout, ce qui est dû en grande partie à la personnalité de son chanteur Keith Caputo, qui après avoir chanté son mal-être pendant une bonne vingtaine d'années a décidé de crever l'abcès il y a cinq ans et d'assumer ce qu'il était vraiment, c'est ainsi que Keith est devenu Mina, un changement personnel qui a forcément un impact sur un Life of Agony qui a toujours été l'exutoire des émotions de sa chanteuse, le fait de s'assumer réellement comme elle va jouer sur un album qui montre enfin un groupe en paix avec lui-même qui retrouve ici une certaine cohérence, A Place Where There’s No More Pain est un album à l'image de sa chanteuse, généreux et sincère.
Surtout, Life of Agony renoue avec une envie et une verve salvatrice, pour un album qui joue réellement sur une certaine nostalgie, A Place Where There’s No More Pain ne sera pas marqué par une quelconque évolution où une volonté d'expérimenter, il renvoie directement à une époque précise du groupe, ce nouvel album est en quelque sorte le chaînon manquant entre River Runs Red et Ugly, un peu comme si Mina revisitait son passé, la confiance et l'assurance en plus, en dehors de ça, ouais, ça sonne vraiment comme du Alice in chains.
Vous savez ce qui ressemble un peu à du Alice in Chains? A Pale Horse Named Death, et vous savez qui est la tête pensante dans A Pale Horse Named Death? Sal Abruscato, qui est aussi batteur dans Life of Agony, l'influence Grunge à la qui vous savez sera très présente sur A Place Where There’s No More Pain, ainsi que pas mal de références à Type O Negative où à la scène Hardcore comme c'est le cas sur un titre d'ouverture qui résonne comme une déclaration d'intention de la part du groupe, on est en plein dans cette mouvance alternative avec un riff Hard Rock bien lourd et une rythmique massive teinté de Hardcore, le morceau tabasse bien, c'est très rentre-dedans, et ce sera justement compensé par un chant très juste de Mina Caputo toute en sensibilité et en assurance, Mina nous offre ce qui est surement sa meilleure prestation dans le contexte de Life of Agony avec cet album pour toutes les raisons précédentes.
Right This Wrong sera tout autant chargé en Groove, ce qui sera récurrent sur l'album, mais c'est bien du côté du Grunge et d'Alice in Chains que va pencher le groupe avec des riffs lourds et des ambiances particulièrement sombres, l'impression d'entendre un mix entre Alice in chains et Type O Negative sera forte sur des morceaux comme A New Low ou Walking catastrophe, cette orientation s'avère assez réussie sauf quand Mina tombe un peu trop dans la pathos comme dans le pas vraiment subtil Song for the Abused qui rassemble tout un tas de clichés pathos alternatif des années 90 dont on pensait être débarrassé, notamment cette outro émotive Little Spots of You dont le groupe aurait pu faire l'économie.
L'album est d'ailleurs moins bon sur la fin où la formule semble s'étirer un peu trop dans le grunge et le gothique alternatif un peu chiant, il faut dire que c'est bien au début que le groupe tire ses meilleures cartouches, notamment un excellent morceau-titre A Place Where There’s No More Pain qui envoie la sauce avec une verve contagieuse et un refrain efficace à mort, World Gone Mad sera aussi marqué par le même sentiment d'urgence et un haut niveau d'énergie, et dans l'ensemble, Life of Agony se montre bien à l'aise dans les passages groovy efficaces qu'il parvient à contrebalancer avec des parties plus lourdes et atmosphériques comme par exemple Bag of Bones.
A Place Where There’s No More Pain, c'est peut-être pour Life of Agony cet endroit confortable où il peut revenir à River Runs Red sans que cela ne sonne comme une simple resucée, en sonnant étrangement frais malgré les très nombreuses références à ce disque disque mais aussi à Alice in Chains, il faut dire aussi que Mina Caputo n'est plus du tout la même vocaliste qu'il y a vingt ans et que sa prestation est excellente sur ce nouvel album sauf quand elle en fait un peu dans le registre émotionnel en tombant dans la pathos lourdingue, ce qui n'est heureusement pas souvent le cas.
La production du disque est bonne, c'est un son très conventionnel pour ce genre de production Rock altetrnative, un son puissant et clair qui semble mettre davantage en valeur les morceaux les plus rentre-dedans, alors que les titres les plus grunge et émotionnels (donc à la Alice in chains) auraient surement mérité un son un peu plus rond et avec plus d'aspérités.
Quoi qu'il en soit, à défaut d'être un grand disque ou un disque génial, Life of Agony nous délivre avec A Place Where There’s No More Pain un bon petit disque rassurant pour signer son retour après plus de dix ans de silence, un album efficace qui joue sur les forces du groupe, des forces renforcées par une Mina enfin à l'aise dans son rôle de frontwoman, pour un disque sincère chargé de groove et d'énergie.
Track Listing:
1. Meet My Maker 03:51
2. Right This Wrong 05:01
3. A Place Where There's No More Pain 02:45
4. Dead Speak Kindly 04:51
5. A New Low 03:58
6. World Gone Mad 03:06
7. Bag of Bones 05:05
8. Walking Catastrophe 03:30
9. Song for the Abused 04:45
10. Little Spots of You 03:37