La vie est un éternel recommencement.
Où en serait Satan's Host si Harry Conklin (Jag Panzer, Titan Force) n'était pas revenu au bercail en 2009? surement nulle part, surement encore en train de faire du Black/Death plutôt médiocre et quelconque, une bonne idée qu'a eu le guitariste Patrick Evil que de rapatrier son chanteur original, surement le vocaliste le plus sous-estimé du Power Metal.
Avec ce bon vieil Harry, alias Leviathan Thisiren, alias encore The Tyrant (ouais, on aime bien les pseudo à la con chez Satan's Host, dont un batteur qui s'appelle Evil Little Hobbit, #Facepalm), le combo américain est finalement revenu à ce qu'il sait faire de mieux, du Power Metal Evil et menaçant, qui bien évidemment nous renvoie au premier album, Metal from Hell (1986), un Power Metal, assez théâtral, où viennent se greffer de discrètes mais gouleyantes références au Black/Death qui les a occupé pendant la dizaine d'années de la période L.C.F. Elixir (décidément, ce groupe à des chanteurs aux pseudos bien bizarres).
By the end of the Devil, puis Virgin Sails en 2013, avaient démontré la capacité de Satan's Host à se réinventer, à changer, pour le meilleur, et deux ans plus tard, c'est par un double album chargé jusqu'à la gueule que les américains font leur retour dans les bacs... Wait, un double album? alors que le principal reproche que l'on pouvait émettre à l’encontre de Virgin Sails était justement sa longueur excessive? curieuse idée, et bien entendu, vous tenez là le premier défaut de ce double album des américains, le premier, car pour la première fois depuis le retour de Conklin, on retiendra plus les défauts que les qualités de ce Pre-dating God.
Pourtant, soyons clairs, Pre-Dating God n'est pas un mauvais album, loin de là, mais on aurait aimé qu'il soit bien plus concis, car sortir un double album ne se justifiait pas du tout dans ce cas précis, après tout, Pre-dating God était à la base un album simple, et c'est le choix du groupe d'avoir décidé de tout sortir d'un coup et donc de faire deux disques, n'aurait-il pas été plus judicieux de sortir un seul album, même assez long, plutôt qu'un double album de deux fois 40 minutes? surtout que viennent se greffer une reprise de Grim Reaper sur le disque 1, et une version remixée pas du tout indispensable du titre éponyme à la fin du disque 2.
Cette longueur excessive ne va pas empêcher Satan's Host de jouer sur ses forces habituelles, dont cette distanciation avec le Happy Power à l'européenne où, en quelque sorte, c'est le modèle allemand qui s'est imposé, un Power Metal aux structures simples, confortable, gavé d'orchestrations over the top, de refrains catchy et de chœurs emphatiques, qui le rende très listener friendly, Satan's Host est à l'opposé, son Power est agressif, sombre, torturé, un inclinaison un poil plus extrême héritée de leur période Black/Death, un son plus dur qui malgré tout sait se faire théâtral de par la prestation au top niveau d'un vocaliste couteau suisse qui maîtrise toutes les facettes du genre.
Voilà le second petit problème, c'est assez subtil, mais malgré tout présent tout au long du double album, Pre-Dating God est ultra dominé par Harry The Tyrant, surement plus qu'auparavant, Conklin est un léviathan qui prend une place considérable dans la musique du groupe, au point où il en arrive à parfois complètement éclipser la musique, c'est assez bizarre, mais Conklin est tellement dominant que son chant versatile et imposant est la seule chose que l'on arrive à retenir de cet album, on retient ses mélodies vocales vicieuses et accrocheuses, ses changements d'intonations maîtrisés, où l'on remarque qu'il a de plus en plus tendance à nous offrir des passages haut perchés qui se rapprochent de King Diamond, mais l'on a bien du mal à retenir un riff tant Conklin est LA star de cette cuvée 2015 de Satan's Host.
Cela reste un défaut mineur malgré tout, car si vous avez aimé Virgin Sails, il va être difficile de faire la fine bouche et de renier ce Pre-Dating God qui oeuvre dans le même registre, avec, il faut bien avouer, une certaine efficacité.
Le disque 1 s'ouvre sur un Hell's Disciples très agressif au début, rageur, avec un chant à la King Diamond bien Heavy et succulent, et le morceau va évoluer dans un registre plus sombre par la suite, avec un passage central très proche du Power à la Nevermore, avec même quelques gang shouts vers la fin, c'est la recette habituelle qui fonctionne très bien, avec le défaut habituel de Satan's Host, qui est de faire des morceaux qui sont toujours trop longs d'une minute, les américains sont toujours dans leur format de chanson entre six et sept minutes, c'est habituel, et je crois que ça ne changera jamais, et condamné je suis à me plaindre de ça.
Heureusement, la durée, à mon avis, toujours excessive, ne va pas trop nuire au plaisir d'écoute, et c'est bien le principal, car après Hell's Disciples, le groupe va enchaîner avec un Embers of Will qui va une fois encore débuter de manière très agressive, pour un morceau menaçant, où le chant se fait plus possédé et particulièrement occulte, la première moitié sera un peu répétitive malgré tout, jusqu'à quatre minutes où ça va véritablement décoller, le morceau se faisant plus versatile, alternant entre un certain sens de la violence classieuse et des passages théâtraux où viennent se mêler chœurs et leads pour un résultat plutôt épique.
Après ce début d'album en forme de gros Bang, il est temps de ralentir un peu le tempo avec un Valley of Blood lourd et menaçant, d'où se dégage un groove funeste avec une petite apparition des growls, Conklin fait une nouvelle fois preuve de sa versatilité, heureusement qu'il fait le show sur ce morceau afin de combler le déficit de créativité de la musique, d'ailleurs l'éponyme suivant sera un peu construit de la même manière, un mid tempo ambiancé qui va s'activité de temps en temps histoire de réveiller un auditeur qui aurait tendance à s'endormir sur un morceau une fois encore un poil trop long, bien plus efficace, After the End, la Power Ballade de rigueur dans ce genre d'album, en forme de gradation, de plus en plus Heavy pour aboutir à une seconde moitié plus speedé qui arrache les poils, notons quand même la bonne reprise du See you in Hell de Grim Reaper où ce bon vieux Harry va nous livrer une prestation à la Bruce Dickinson sur ce morceau d'obédience Heavy Metal classique à l'ancienne, ça a au moins le mérite d'être efficace, malgré le peu d'intérêt suscité par cette reprise un peu trop scolaire, on aurait largement pu s'en passer.
Je dois bien vous avouer que je n'ai pas grand chose à dire de pertinent concernant le deuxième disque de Pre-Dating God, à part peut-être qu'il est un poil moins bon que le premier, pas de grand chose, mais le groupe y donne le sentiment d'être un peu en roue libre, les morceaux ont encore plus tendance à traîner en longueur, c'est globalement moins catchy, moins fun, et l'on va naviguer entre des accélérations violentes et des passages assez heavy et mid-tempo (Lady n' the Snake), et l'on retiendra principalement du growl un peu plus présent, notamment sur le très direct Soul Wrent, et encore davantage sur As the Dead, They Sleep, c'est également vers la fin du disque que l'on ne peut s'empêcher de penser qu'on aurait pu largement se passer d'un Descending in the Shadow of Osiris incroyablement long et chiant où l'on se croirait par moment chez un mauvais Blind Guardian, et plus encore de la reprise Pre-dating God (Classic Metal Re-Mix) qui est comme son nom l'indique le même titre éponyme présent sur le disque 1 avec juste un mix plus old school, mouais, ça donne l'impression que c'est juste du remplissage.
Il faut dire que le peu d'entrain à l'écoute de cette Part 2 est renforcé si vous vous êtes tapé le premier disque avant, 80 minute de Satan's Host, malgré le savoir-faire indéniable et la certaine qualité de la musique, ça fait long, surtout que l'on est pas aidé par une production fatigante, un son compressé qui manque de dynamisme, le bon gros DR5 des familles bien pénible, une production qui ne fait également que renforcer le rôle de mâle alpha de Conklin tant il est mis en avant au dépend du reste...
Pre-dating God démontre une fois de plus toutes les qualités de Satan's Host depuis le retour de Conklin, un excellent Metal from Hell très sombre et agressif, mélange de Power Metal et de références Black/Death, qui prouve une fois encore que Satan's Host est l'un des meilleurs groupes de Power Metal "classique" américain, ce qui n'est quand même pas rien.
Malgré tout, ces deux albums ne sont pas exempts de défauts, la domination totale de Conklin en est un, de même que la longueur excessive du bouzin une fois réunies les deux parties, qui sont d'ailleurs vendues séparément, même si Moribund Records propose un bundle réunissant les deux galettes.
Pre-dating God Part I est un poil meilleur que Pre-dating God Part II, plus consistant, plus fun, plus concis aussi, alors que les compositions de Part II donnent l'impression de traîner anormalement en longueur, de ce fait, je vous conseillerais bien de vous en tenir à la Part I, mais si vous en êtes au point d'acheter un album de Satan's Host, c'est que vous êtes déjà fan et de toute façon vous achèterez les deux.
Je reste quand même sur ma position de départ, il y avait moyen de faire un excellent disque mais Satan's Host a préféré en sortir un très bon, et un autre moyen, avec quelques longueurs et des morceaux dispensables, c'est ainsi, Part I mérite un bon petit 4/5 alors que Part II vaut à peine un 3/5, la note finale sera donc entre les deux, quoi qu'il en soit, si vous aimez votre Power Metal à la fois agressif et mélodique, en jouant à fond la carte de l'occulte, écouter Satan's Host est une bonne idée, surtout que les deux disques valent le coup rien que pour la prestation de Harry Conklin.
Power Metal From Hell
Track Listing:
Part 1:
1. Hell's Disciples
2. Embers of Will
3. Valley of Blood
4. Pre-dating God
5. Greed, Lust, Hate, War
6. After the End
7. See You in Hell (Grim Reaper cover)
Part 2:
1. Fanning the Flames of Hell
2. Soul Wrent Heavy
3. Lady n' the Snake
4. As the Dead, They Sleep
5. Descending in the Shadow of Osiris
6. Reprise: Pre-dating God (Classic Metal Re-Mix)